1_ Les premiers flocons

Scout fuyait à toute vitesse. L'ennemi n'était pas loin. Il se cacha derrière un rocher juste assez grand pour lui. Plaqué contre la roche froide, il essayait de retrouver un rythme de respiration normal mais sa course effrénée l'avait essoufflé. Il entendit la neige craquer. L'autre arrivait.
Il plaqua ses mains contre sa bouche pour éviter tout bruissement mais il vit alors la botte noire dépasser sa cachette. Le jeune homme poussa un cri et… se prit une boule de neige en pleine figure.

-PUTAIN C'EST FROID ! PAS DANS LA FIGURE PYRO ! hurlait-il.

Mais le pyromane éclata d'un rire étouffé, en raison du masque qu'il portait. Il brandit ses poings en l'air en signe de victoire puis aida son collègue à se relever. Celui-ci du enlever son bonnet et son écharpe pour enlever la neige qui s'était accrochée dessus. Une fois qu'il eut remis ses vêtements en place, Pyro se mit à courir pour éviter la vengeance du gamin. Cependant deux grosses boules de neige le firent tomber et il s'écrasa, face au sol. Cette fois ce fut au tour de Scout de rire aux éclats.

Derrière la fenêtre de la cuisine, Engineer regardait ses deux jeunes coéquipiers jouer ensemble dans la poudre blanche. Il souriait tout seul derrière la vitre, accoudé au plan de travail quand Spy se glissa derrière lui :

-Qui regardes-tu avec tant de tendresse, mon ami ?

L'autre sursauta et se retourna, l'air surpris :

-Hein ?! D'quoi tu parles, part'naire ?

-Allons, je te vois là depuis tout à l'heure et je doute que tu souris bêtement dans le vide.

-Mêles-toi don' d'ton cul, Spah, répliqua l'ingénieur en levant un sourcil.

Le Français haussa les épaules avec un sourire en coin il savait bien de quoi il parlait.
La porte d'entrée s'ouvrit violemment, et le pyromane apparut dans l'encadrement de la porte de cuisine :

-Mpphf mpphffght hmtprfmeppgmrpem mmggghprr !

-Doucement, Pyro ! s'exclama Spy qui n'arrivait pas à traduire.

-Ah oui ! Il neige ! affirma Engineer en regardant par la fenêtre.

Le pyromane sauta dans l'entrée, excité par ces flocons flottant et reparti dehors laissant derrière lui une trainée de neige fondue et de boue. L'homme masqué soupira :

-Il pourrait faire attention, tout de même !

-Laisse le don' s'amuser, c'est la première fois qu'y voit d'la neige ! R'garde le comme il s'amuse !

-Moi je ne suis pas du genre à m'attendrir pour des machines et des monstres de feu qui mettent de la boue dans l'entrée vois-tu ? grommela l'espion en allant chercher une serpillère. Aide-moi un peu.

-Roh ! Il a enl'vé sa capuche, il va attraper la crève comme ça ! fit l'ingénieur qui n'écoutait pas.

-Engineer ! l'interpella l'autre plus fort.

Le mécano s'excusa et vint lui prêter main forte après avoir redressé son fidèle casque jaune sur son crâne. Ils parvinrent rapidement à nettoyer les dégâts de leur collègue et déposèrent quelques serpillères sur le sol mouillé. Spy leva les yeux vers le mécano et voulu savoir :

-Alors ? Tu en pinces pour qui ?

-Qui en pince pour qui ? Demanda une voix rauque et forte derrière eux.

Les deux hommes tressaillirent et se retournèrent pour saluer nerveusement le militaire.

-Alors ? fit-il simplement.

-Mais… mais personne Solly ! assura l'ingénieur déconcerté.

-Je le taquinais c'est tout ! défendait le Français en rajustant sa cravate.

Soldier pointa un doigt sur l'homme plus petit :

-J'te préviens, j'veux pas d'ça ici !

-Pardon ?! Qu'est c't'insinue là ?! s'indigna le Texan.

-J'n'insinue rien, j'affirme !

Engineer fit alors un pas en avant vers le casque de fer et le désigna à son tour :

-Je n'te permet pas d' « affirmer » quoi qu'ce soit sur moi de cette façon, c'est clair ?!

-Ici c'est moi qui commande, je te rappelle ! Et je n'accepterai pas que tu détournes nos collègues !

-Dé… Quoi ?! Détourner nos collègues ? Mais ça n'va pas bien dans ta tête, mon vieux !

-Tu préfères peut-être que j'emploie d'autres mots !? Nos mercenaires ne sont pas là pour tes petites coquetteries.

S'en était trop pour l'ingénieur. Depuis qu'ils étaient arrivés au chalet, le soldat n'arrêtait pas de faire allusion à son orientation sexuelle et de le dénigrer à ce sujet. Il était pourtant impossible qu'il ait découvert qu'il était gay, l'ingénieur était plutôt discret là-dessus. À moins que l'espion ayant découvert la face cachée du mécano n'est pas tenu sa langue.
Il ne put se contenir plus longtemps :

-Damned ! Mais t'pas bientôt finit 'vec ton ramassis d'conneries ?! s'emporta le petit homme.

-Alors c'est comme ça que tu me parle maintenant ?! Tu ferais mieux d'avouer au lieu de dire n'importe quoi !

-Damned t'es vraiment con, ma paroles !

Le militaire lui donna un coup sur le casque pour le faire taire et lui faire respecter ses règles. Mais l'ingénieur n'approuva pas ce geste et frappa son coéquipier un peu trop agressif. S'ensuivit alors une petite bagarre insensée entre les deux hommes. Tantôt ils se frappaient, tantôt ils s'empoignaient par le col en beuglant quelques insultes. Spy, à quelque pas d'eux et ne voyant pas la fin de cette dispute, préféra aller chercher du renfort auprès du Scout et de son compagnon de jeu plutôt que de plonger au milieu des coups de poings.
Lorsqu'ils revinrent tous les trois dans la cuisine, les bagarreurs luttaient encore, lançant leurs bras à l'aveuglette. Soldier se prit un coup de poing dans la joue et il répliqua par une droite mal calculée. Engineer vacilla et son casque roula par terre. Cependant il ne tomba pas il s'agrippa à son adversaire et le fit chuter à sa place.
Les spectateurs, eux, ouvraient de grands yeux et Pyro avait porté les mains à sa bouche (ou plutôt là où elle se situait derrière le masque.).
Le Texan se mit à cheval sur l'autre homme pour le bloquer contre le sol et l'empoigna par le col de son manteau.

-C'est bon ?! T'as fini d'm'emmerder maintenant ?!

La réponse à sa question fut évidemment une bourrade de la part de l'homme belliqueux. L'impact fut assez fort pour que les lunettes de soudure s'envolent et que l'ingénieur roule par terre.
Spy et Scout se précipitèrent sur Soldier pour l'arrêter et le pyromane se chargea de relever l'autre.
Les hostilités se calmèrent enfin. Le petit Bostonien et l'homme en costard étaient parvenus à retenir le militaire furieux et à l'emmener ailleurs, agitant leur tête pour assurer qu'il avait forcement raison et le calmer. Mieux valait lui mentir et ne pas déclencher une seconde querelle.

De son côté, Pyro remettait en place les bretelles du mécano et époussetait ses genoux.

-Merci, mon garçon.

-Hmm… mrgghmm mgrefmmmh ?

-Ah rien, n't'en fais pas, juste une p'tite dispute.

-Ahm brrrhob fwa ?

-Heum… Des histoires ent' lui et moi, n't'inquiète pas !

Engineer était un peu plus grand que la plus part de ses homologues et dépassait légèrement le pyromane. Mais cela ne gêna pas l'incendiaire pour prendre le visage de l'homme plus vieux dans ses mains et le lui maintenir pour mieux le regarder. L'autre parut déconcerté :

-Heu… un problème ?

-Veuh mfavvè pfwa rhf fvaih veuh bhheu ?! fit Pyro surpris.

-Heu… b'en, si, si j'ai les yeux bleus, petit, tu vois, lui répondit le mécano amusé par sa remarque.

En effet, Pyro avait déjà vu son collègue sans casque mais jamais sans lunettes. C'était la première fois qu'il voyait ses yeux, tout comme c'était la première fois qu'il voyait de la neige tomber du ciel. Et il trouvait ces deux choses aussi merveilleuses l'une que l'autre.
Il joignit ses mains contre son torse et lui marmonna :

-Fhon magnhhhhffk !

Engineer éclata de rire :

-Merci du compliment, part'naire, c'est gentil !

-Nnh fhé fvrrhé !

Pyro insistait, l'air ému et l'homme en salopette ne put s'empêcher de lui sourire ainsi que de lui caresser la tête. Alors le masque à gaz frissonna à se détourna à la vue de se regard si doux qui lui était adressé. Il porta sa main devant son filtreur dans un geste timide, au grand étonnement du Texan. Il ne savait pas que Pyro pouvait faire preuve d'autant de timidité. Il l'avait déjà vu embarrasser lorsque l'équipe parlait de certains sujets ou qu'il devait s'adresser à quelqu'un d'autre, mais jamais il ne l'avait vu agir de la sorte.
Il lui accorda un regard attendrit :

-Allons, mon grand, j't'impressionne ?

L'autre secoua nerveusement la tête, tordant ses mains convulsivement avant de lui dire d'une petite voix :

-Fwah nh ékhhmmmhoz ha…

-Une ecchymose ?

Il toucha sa pommette droite et sentit une légère douleur.

-Hm… ça c'est Solly. Il a un sacré revers, fit il en haussant les épaules.

Il se pencha ensuite pour ramasser ses lunettes et commençait à les remettre quand la main gantée du pyromane l'arrêta dans son geste :

-Hhhoooow vfhan prrih ! vveuh enkhhorrr rhardé dé yheu ! suppliait-il.

-Hein ?

Engineer avait parfois du mal à comprendre Pyro, surtout quand il s'agissait de phrases qui n'étaient pas habituelles. Mais l'homme en combinaison l'obligea à garder ses lunettes autour du cou et joignit les mains en signe de supplication. Le Texan rit :

-D'accord, petit, j'laisse ça là si ça peut t'faire plaisir !

L'incendiaire applaudit, heureux, puis il montra la fenêtre en lui tirant le bras pour lui signifier qu'il voulait qu'il l'accompagne dehors. L'ingénieur lui sourit de nouveau et acquiesça. Seulement, il le retint par l'épaule et le fit tourner vers lui pour lui remettre sa capuche ornée de fourrure synthétique sur la tête. Il s'habilla également d'un manteau chaud et d'un bonnet avant de sortir dans la froidure de cette journée d'hiver.

-Et si on f'sait un bonhomme de neige ? suggéra-t-il.

-Keffhk fèh ? demanda son partenaire en penchant la tête.

-Bah… Un bonhomme en neige, lui répondit le Texan en riant.

Il lui montra alors comment faire. Ils firent rouler une boule de neige sur le tapis blanc pour la faire grossir, croisant de temps en temps leurs bras dans des gestes maladroits. Engineer jetait de temps en temps quelques petits coups d'œil au masque à gaz qui se tournait alors aussitôt vers leurs mains. Il souriait alors sous son écharpe et ne pouvait que trouver son collègue adorable. Le bas du corps enfin fait, ils passèrent au torse de leur sculpture, s'améliorant dans le maniement de la neige. Puis le pyromane se chargea de la tête qu'ils accrochèrent tous les deux au reste du corps. Ils partirent ensuite à la recherche de branches et de petites pierres pour décorer leur œuvre. Ils se séparèrent pour élargir leur champ de recherche.
Le mécano pouvait voir au loin la combinaison rouge qui sautillait dans la neige molle. Il devait sûrement s'amuser à faire des empreintes de pas. Il s'approcha d'un maigre buisson et cassa deux branches. Il ne restait plus que les cailloux. Il se retourna pour voir si Pyro avait trouvé quelque chose mais il avait disparu.

-Pyro ? appela-t-il.

Mais pas de réponse.
Il retrouva les empreintes de pas de l'incendiaire et les suivit, l'air inquiet. Il appela de nouveau et cru entendre une réponse. Il précipita ses enjambés dans la neige plus dense au milieu des rares arbres dénudés. Le terrain était creusé par endroit et l'ingénieur manquait parfois de tomber en s'enfonçant trop soudainement dans un trou. Il accéléra le pas lorsqu'il entendit des gémissements étouffés, mais la poudre blanche qui lui montait jusqu'aux genoux l'empêchait de courir. Il jura et parvint à trouver son compagnon au centre d'une coupole de neige. Il s'arrêta en haut de la descente et éclata de rire.
Pyro était étalé au sol, emmêlé dans les branches d'un vieux tronc tombé là. Il ne parvenait pas à se relevé, retenu par ses bretelles et appelait l'ingénieur en geignant.

-J'arrive, mumbles, j'arrive ! lui dit le mécano toujours en riant.

Il glissa dans la neige et dépêtra le pauvre pyromane pris au piège. Il le prit ensuite par les mains et le releva avec force. L'incendiaire, ne s'attendant pas à être relevé aussi vite il vacilla et percuta son partenaire. Celui-ci glissa, voulu se rattraper à l'autre homme et tomba en arrière en l'entrainant dans sa chute. Heureusement, le lit de flocons les accueillit en douceur. L'un sur l'autre, ils se regardèrent un moment, silencieux, puis le masque à gaz se mit à rire joyeusement. Engineer l'imita, frottant le dos de son collègue et ils se relevèrent.

-Tfha frrrowah ? demanda Pyro.

-Ouais, un peu, pourquoi ?

-Tfè thouh rroujh !

-Hein ?! Rouge ? Heu… s'agitait l'ingénieur.

Il toucha ses joues réchauffées par la présence du démarreur de feu et sentit les battements de son cœur s'accélérer.

-Oui, c'est l'froid ! mentit le mécano.

-Fhè miinhon, dit l'autre simplement.

-Dis pas d'bêtise, y a rien de mignon là-dedans, j'ai juste froid !

Il n'aurait pas dû dire ça. Ou peut-être que si, finalement, car Pyro le serra alors contre lui et lui frotta le dos. Il ne put s'empêcher de l'enlacer à son tour avec un sourire bienheureux. Il arrivait parfois que Pyro fasse ce genre de chose pour le consoler ou quand il était juste très content, mais ça lui faisait toujours un drôle d'effet. Un effet de chaleur montant de son ventre pour se diffuser dans tout son corps.

-Ahvvvk tfè vvyeuh bhheu fah tfhè nh èrrh addhorrbbbh, lui dit l'incendiaire.

-Arrête ça, je n'suis pas adorable, j'suis un vieux mécano en salopette ! plaisanta l'autre.

Puis il l'écarta et lui sourit comme un père sourirait à son enfant.

-Aller viens ! On va l'finir c'bonhomme de neige, hm ?

Le masque à gaz s'agita affirmativement et partit devant.

Le bonhomme de neige trônait dehors avec un seau sur la tête en guise de casque et une écharpe autour du cou. Ses deux créateurs le surveillaient depuis la fenêtre de la cuisine tout en préparant le dîner. Parfois, Engineer devait prendre le masque à gaz dans sa main pour le tourner vers la gazinière, Pyro étant trop distrait par l'homme du froid dehors.

-Évite d'tout brûler, petit, j'veux manger chaud mais pas carbonisé ! plaisantait-il.

L'homme en combinaison ignifuge lui répondait alors par un rire. L'ingénieur sourit en secouant doucement la tête.
Le repas enfin prêt, ils se mirent tous les neuf à table et dégustèrent le plat chaud. Sauf Soldier qui, bras croisés sur la poitrine, refusait de toucher au plat préparé par son collègue. Celui-ci soupira et lui dit gentiment :

-Inutile d't'affamer, Solly, c'pas comme ça…

-Lâche ! lui lança le militaire.

-D'ccord… une aut' fois…

Les autres mercenaires n'osaient pas briser ce silence tendu. Seuls les couverts grinçaient dans les assiettes. Ils ne préféraient pas se mêler aux affaires du soldat au risque de subir sa colère.
Enfin Pyro se mit à marmonner joyeusement, parlant de la neige, des flocons, du ciel et des jeux avec Scout. Medic et Sniper hochaient la tête, écoutant les histoires de leur coéquipier, tandis que le plus jeune ajoutait quelques commentaires. Les autres étaient trop occuper à manger ou bien à surveiller l'homme au casque de fer. Le mécano, quant à lui, préférait garder les yeux sur son assiette, conscient du regard noir tourné vers lui. Il n'avait pas envie d'une nouvelle bagarre.
Un à un, les mercenaires sortaient de table pour regagner leur chambre. Sniper, lui, sortit pour aller s'enfermer dans son Van soi-disant « plus douillet » que les chambres du chalet. Il ne resta plus qu'Engineer et Soldier à table.

-J'te préviens, j't'ai à l'œil, et au moindre faux pas, cette fois, c'est moi qui te ferais bouffer la poussière comme un chien galeux !

-Arrêtes de psychoter, c'tout Solly… lui répondit le Texan, fatigué par ses accusations.

Pour une fois, Soldier se tue. Il pointa juste l'homme assis devant lui et désigna ses propres yeux. Puis il se leva et disparue dans le couloir, sûrement partit se cloitrer dans sa chambre.
Engineer débarrassa la table et regarda la vaisselle sale avant de se dire qu'il s'en occuperait le lendemain. Il était épuisé, il avait envie de se reposer.
Cependant, en arrivant dans sa chambre, le sommeil n'était pas au rendez-vous. Il alluma alors la petite télévision qu'il avait ramenée dans sa chambre et s'assit confortablement sur son lit, dos contre le mur décoré de vieilles photos et d'un calendrier démodé.

Engineer passa au moins une heure à regarder tranquillement l'écran de sa télévision jusqu'au moment où l'image se brouilla. Il se leva et frappa sur le dessus du boitier. Le film revint pendant quelques secondes et les personnages se brouillèrent de nouveau. Il fut alors attirer par un bruit dehors. Enjambant quelques affaires, il alla tirer le rideau de sa chambre et regarda au dehors par le trou d'un des volets : une véritable tempête de neige s'acharnait sur leur chalet. Les violentes bourrasques faisaient craquer le bois et sifflaient sourdement dans les conduits tremblants.
Quelqu'un frappa à sa porte. L'ingénieur fit le chemin inverse et ouvrit. Pyro se tenait devant lui, emmailloté dans une couverture.

-Eh bien, tu n'dors pas, mon garçon ? s'intrigua Engineer.

-Vhhu… vh nh ppeeh peerrrh… répondit l'autre honteusement.

Le plus vieux jeta un œil dans le couloir puis il laissa entrer son coéquipier dans sa chambre et le fit asseoir sur son matelas. Il croisa ensuite les bras et avec un sourire paternel, il l'interrogea :

-Qu'est c'qui peut b'en faire peur à un dur à cuir comme toi ?

Le dur à cuir en question rentra la tête dans les épaules et pointa son doigt en direction de la fenêtre. L'autre leva les sourcils, étonné, et s'assit à côté de lui pour lui frotter le dos. Il lui parla alors d'une voix douce pour le rassurer :

-Allons, c'n'est qu'du vent et un peu d'neige, y a pas d'quoi avoir peur, mon grand !

-Fhè dehiihrrhfhan…

-Mais non c'n'est pas terrifiant ! fit-il en riant gentiment, et puis, Scout est avec toi !

-If mokrrrrèh ddmwa…

-Bon t'marques un point, c'vrai que Scout est pas d'genre à rassurer mais plutôt s'moquer…

-Veuh pfhe dhrrmhr hvèk dwah ? demanda l'incendiaire timidement.

-Dormir avec moi ? Heu…

Il rougit et jeta un œil à la télévision qui grésillait devant eux depuis un moment. Impossible de visionner quoi que ce soit dessus et de mentir au pyromane. Non pas qu'il n'aurait pas voulu mais, ça le gênait il avait peur des réactions que pourrait avoir le petit incendiaire vis-à-vis de lui s'il apprenait ses sentiments à son égard. D'un autre côté, il était difficile pour lui de refuser quoique ce soit au masque à gaz tourné vers lui. Il était recroquevillé sur lui-même au creux du matelas et il devait sûrement avoir un peu froid hors de son habituelle combinaison. D'ailleurs, il avait gardé son pull sur lui pour éviter la morsure de la fraicheur environnante.
Engineer hésita un petit moment et soupira.

-Pas d'problème, part'naire.

D'un coup, Pyro se leva en s'approchant de lui, le touchant presque du filtreur d'où sortit une petite voix gêné :

-Fèh furrh fah dhhraaanj pfwa ?

-Heu… Non, pas du tout, répondit le mécano en détournant les yeux.

Les bras du pyromane s'accrochèrent à son cou avec douceur et leur deux corps se pressèrent l'un contre l'autre. Engineer sentit la chaleur de son ventre s'étendre dans tout son corps, jusqu'à ses oreilles rougies. Il crut qu'il ne tiendrait jamais, surtout quand les mains dénudées du démarreur de feu glissèrent sur ses joues pour maintenir sa tête en direction du masque à gaz.

-Fah frrwa ?

-Heu n-non j'ai… j'ai chaud !

-Drroujjhhi offih kanh da shho ?

-Ouais, aussi… hem…

Un petit rire enfantin sortit du filtreur. L'ingénieur leva les yeux au ciel et attrapa la tête de son partenaire pour la serrer contre son torse en riant :

-Aller, au lit, mon garçon, c't'évitera d'poser des questions comme ça !

Il le libera et le jeune mercenaire disparue sous les couvertures du Texan, se serrant contre le mur pour lui laisser de la place. L'autre enleva au moins son pull et le rejoignit dans le lit à la fois mal à l'aise et terriblement heureux. Il éteignit la lumière et laissa place au noir et au bruit de la tempête qui faisait rage dehors. Il sentit son invité se retourner sur le matelas et se blottir contre lui.

-Shhhh… Je suis là, il n't'arriv'ra rien, c'est promis, hm ? chuchotait-il doucement.

-Hhmmmmf…

-T'as t'jours peur ?

-Mwnh…

-Bien…

-Vèmmh dèh yèuh… fonh fi … vwohi…

-Décidemment, t'fais une fixation sur mes yeux !

-Mè fè bho…

-Et toi, tu n'voudrais pas enl'ver ton masque ? détourna l'ingénieur.

-… nnh…

-Vraiment pas ? insista-t-il.

Il sentit son collègue se serrer un peu plus contre lui. Il eut un petit rire et abandonna.

-Dors, Pyro, j'suis là.