Cet épisode d'intro se situe peu de temps après mon OS "Nous trois". Et lui servent de suites (même si se passant quelques années plus tard) mes fics "Avec toi, ça fait six", "Comme un air de famille" et "Je te garde cette nuit".
Si vous n'avez pas lu "Avec toi, ça fait six", on est sur de la fic qui, tout en se passant dans l'univers canon (Cet épisode d'introduction se passe un peu avant les évènements de Crisis Core), reste un poil crack vu que Sephiroth, Angeal et Genesis vont se retrouver à ouvrir un salon de thé. Dans le début, on a du Angeal/Genesis, qui deviendra par la suite du Angeal/Genesis/Sephiroth.
Tout au long de l'épisode, on alterne entre scènes dans le présent et scènes dans le passé.
Kadaj a deux ans, tandis que Loz et Yazoo ont quatre ans.
1 – Présent
— Nous voilà chez nous !
Non sans fierté, Genesis désigne de la main l'établissement à la façade décrépite. Le bâtiment possède un étage et, à en croire ce qu'il reste de l'enseigne, a autrefois été un hôtel-restaurant. Sa devanture en briques rouges est pour l'heure dégradée, ses fenêtres condamnées, de vielles affiches y sont collées les unes sur les autres, sans oublier les détritus de rigueur qui encombrent les abords.
Refermant la portière du camion loué qui les a transportés jusqu'ici, Angeal adresse un regard critique à l'endroit. Il n'en avait vu que des photos, Genesis seul s'étant chargé des visites et de l'achat du lieu, mais… celui-ci a encore plus mauvaise mine qu'escompté. Il ne serait même pas étonné d'apprendre que la vermine y grouille aux quatre coins, ni que l'intérieur soit en bien trop piteux état pour qu'il leur soit possible de s'y installer aujourd'hui.
— Ça va nous coûter une fortune pour le refaire ! grogne-t-il, se demandant s'ils ne se sont pas embarqués dans une tâche impossible.
Kadaj dans ses bras, Sephiroth s'arrête à sa hauteur et, d'un signe de tête, approuve ses paroles. Lui non plus n'a pas l'air tellement rassuré par ce qu'il voit.
Sautant tout juste du véhicule, c'est avec des yeux immenses que Loz et Yazoo observent ce lieu qui doit devenir leur nouvelle maison. La bouche grande ouverte, Loz prend une longue inspiration, comme s'il s'apprêtait à lâcher une exclamation, mais que celle-ci, finalement, se bloquait dans sa gorge. Genesis lève les yeux au ciel.
— Hommes de peu de foi ! Vous pensez sincèrement que j'aurai signé sans savoir à quoi nous attendre en termes de dépenses ?
— N'empêche. C'est encore plus grand que ce à quoi je m'attendais et…
— Il y a même un jardin, le coupe Genesis, qui semble aussi excité qu'un gamin. Un jardin immense ! De quoi permettre à nos trois monstres de se dégourdir les pattes autant qu'ils le voudront !
Puis, leur tournant le dos, il se tient là quelques secondes, le regard pétillant et les poings plantés sur ses hanches. On ne peut pourtant pas dire que cette aventure l'excitait beaucoup au début. La nouvelle existence que le destin avait choisie pour eux s'annonçait à ce point différente de l'ancienne, qu'il avait un peu eu le sentiment qu'on cherchait à se payer sa tête. Mais à présent, sa perception des choses a évolué et il a hâte de découvrir ce que leur réserve l'avenir.
Même si ça reste un peu humiliant, il faut bien le reconnaître…
Sur cette pensée, il revient à ses amis et, un sourire aux lèvres, leur dit :
— Venez ! Il faut que je vous fasse visiter !
2 – Passé
C'est en trombe qu'Angeal et Genesis pénètrent dans l'appartement de leur ami. Le message qu'ils ont reçu quelques minutes plus tôt, alors qu'ils s'apprêtaient à s'occuper de Troisièmes classes fraîchement débarqués, les a suffisamment inquiétés pour qu'ils laissent tout en plan pour le rejoindre. Le contenu en lui-même tenait pourtant à pas grand-chose. Juste quelques mots.
« Venez. Vite ! »
Mais venant de Sephiroth, ceux-ci ont provoqué comme une sonnette d'alarme chez eux.
— Seph, tu vas bien ?!
Essoufflé par leur course jusqu'ici, Genesis trouve leur ami avachi dans son canapé. À leur arrivée, il se tient le dos courbé et la tête entre ses mains. Le regard qu'il lève dans leur direction n'a d'ailleurs rien pour les rassurer, car c'est celui d'un homme dont la vie vient de s'écrouler brutalement et qui ne sait plus à quelles branches se rattraper pour éviter la chute mortelle où on l'a précipité. Et alors qu'Angeal referme la porte derrière eux, Sephiroth leur lance d'une voix brisée :
— Ils sont trois… !
Et comme ses amis le fixent sans comprendre, il prend une inspiration saccadée.
— Ils sont trois… dans la chambre.
Avant de tourner les yeux en direction de la porte de celle-ci, l'expression de plus en plus dévastée. Angeal et Genesis l'imitent, avant de s'échanger un regard perdu. S'approchant de lui, Angeal questionne :
— Qui donc, Seph ?
Genesis, lui, s'est dirigé vers la porte désignée et va pour en abaisser la poignée quand Sephiroth lance :
— Non !
Ce avec une telle force que le Banoran recule de quelques pas, pour lui adresser un regard rond.
— N'entrez pas… ils sont… ils sont effrayés. Et même moi…
Puis il pince les lèvres, secoue la tête, avant de se lever brusquement. Comme il commence à faire nerveusement les cent pas, ses amis se retrouvent momentanément incapables de savoir quelle attitude adopter. Ils n'ont vraiment pas l'habitude de le voir ainsi. D'autant moins qu'en général, Sephiroth a plutôt tendance à camoufler ses émotions pour offrir au monde l'image d'un homme pétri de confiance, au tempérament calme, sinon distant.
— Tu sais, se risque Angeal après plusieurs secondes de silence. Si tu ne nous expliques pas, on va avoir du mal à…
— Est-ce que tu vas te décider à nous dire qui se trouve dans ta chambre, bon sang ?!
Et dans le ton de Genesis, une menace gronde. Celle que si Sephiroth ne s'exécute pas rapidement, alors il pourrait bien perdre patience et aller découvrir par lui-même ce qui se cache derrière ce mystère.
S'arrêtant, Sephiroth leur adresse un bref regard, avant de revenir à la porte close. Et c'est d'une voix lointaine qu'il avoue :
— Mes fils… !
3 – Présent
— Alors, qu'est-ce que vous en dites ?
Sans un mot, Angeal et Sephiroth font le tour de la pièce du regard. Genesis se tient appuyé contre un comptoir en angle poussiéreux, sur lequel des verres retournés ont été abandonnés depuis la Déesse sait quand. Ça sent le renfermé, il y a des toiles d'araignée partout, des débris dont ils ne parviennent à identifier la provenance, ainsi que des tables et des chaises parfois encore intactes, mais trop souvent brisées. Et en fond sonore, les rires et les babillements de Loz et de Yazoo, qui s'amusent à explorer leur nouveau royaume.
— Qu'il va y avoir pas mal de travaux, répond finalement Angeal, qui pour l'heure, a un peu de mal à se projeter.
— Et que ça ne me rassure pas pour l'étage, ajoute Sephiroth, qui a levé les yeux en direction du plafond.
Dans ses bras, Kadaj a passé les siens autour de son cou et somnole, la tête posée contre son épaule. Genesis, lui, a attrapé un menu d'une pile poussiéreuse posée à proximité et en feuillette les pages jaunies.
— Vous me prenez vraiment pour un imbécile, leur répond-il.
— Avoue que pour le moment, ça vend difficilement du rêve.
Et à Sephiroth de soutenir Angeal d'un hochement de tête. Laissant retomber le menu sur sa pile, ce qui soulève un nuage de poussière, Genesis laisse entendre un soupir. Avant qu'il n'ait toutefois pu s'agacer contre ses amis, Loz et Yazoo reviennent au pas de course, le premier poussant un cri. Il vient se cacher derrière Sephiroth, s'agrippe aux jambes de son père et pousse un petit rire, comme Yazoo cherche à l'atteindre et qu'il doit l'esquiver.
Leur manège parvient à sortir leur frère de sa somnolence, qui grogne, avant d'entrouvrir les paupières. Il les suit un moment du regard, puis se frotte les yeux de ses petites mains et commence à se tortiller pour les rejoindre. Sephiroth le dépose seulement à terre quand Genesis réplique :
— Eh bien vous apprendrez, messieurs, que je n'ai pas fait les choses à moitié et qu'une bonne partie du premier étage est déjà habitable. Mais avant de vous y conduire, j'ai encore deux ou trois choses à vous montrer au rez-de-chaussée !
Et disant cela, il les invite d'un geste de la main à le suivre…
4 – Passé
— Comment ça… tes fils ?!
C'est avec le regard rond de ceux persuadés qu'on est en train de se payer leur tête que Genesis fixe à présent Sephiroth. Celui-ci, blafard, vient s'appuyer d'une main au dossier du canapé.
— C'est ce qu'ils sont… mais je l'ignorais…
Réponse qui, bien entendu, ne satisfait pas ses amis. S'approchant de lui, Angeal lui pose une main sur l'épaule ce qui, à son grand étonnement, ne déclenche qu'une faible crispation chez lui. Le regard à présent absent, Sephiroth cligne des yeux. Et à Angeal de lui conseiller :
— Tu ferais peut-être mieux de te rasseoir, non ?
Car au vu de l'état dans lequel il se trouve, il ne lui donne pas longtemps avant de s'écrouler – ce qui ne manque pas de l'inquiéter. Il ne comprend pas encore très bien ce qu'il se passe ici, mais il est clair que toute cette histoire a complètement ébranlé Sephiroth. Celui-ci opine mollement du chef, avant de s'exécuter.
— Qu'est-ce que c'est que cette histoire de fils ? insiste Genesis en le rejoignant. Tu as des enfants, toi, maintenant ?
Là-dessus, il adresse un regard interrogateur à Angeal, qui lui fait savoir d'un signe de tête qu'il n'en savait strictement rien lui-même. Quant à Sephiroth, il lui faut plusieurs secondes avant de parvenir à reprendre la parole.
— Apparemment.
— Apparemment ?
— Seph', intervient doucement Angeal. Ce serait mieux si tu nous racontais tout depuis le début, tu ne crois pas ?
— Je… je vais essayer…, lui répond Sephiroth, avant de se passer une main le long du visage.
Puis de se laisser aller contre le dossier du canapé, où il s'avachit presque. Avec un geste impatient de la main, Genesis s'installe près de lui, tandis qu'Angeal vient se caler sur l'accoudoir et croise les bras. Quand Sephiroth reprend la parole, c'est pour dire :
— C'est Tseng… qui m'en a informé.
— Tseng ? répète Angeal, un peu troublé. Tu veux parler du second des Turks ?
Et comme Sephiroth approuve d'un signe de tête, Genesis fait remarquer :
— Pour qu'un Turk se soit donné la peine de t'informer de quoi que ce soit, c'est que vous devez être proches. J'ignorais d'ailleurs que tu avais des amis parmi ces gens-là !
Et à Angeal, qui trouve lui aussi ce détail particulier, d'émettre un grognement. Sephiroth hausse des épaules.
— Nous ne sommes pas amis… mais nous nous connaissons. Il… ce serait trop long à vous expliquer, mais disons que nous… qu'il nous est arrivé de nous rendre des services et… (Il secoue la tête.) Non, ce n'est pas important. Enfin, tout ça pour vous dire que j'ai eu un message de lui, tout à l'heure et…
Disant cela, son regard se porte en direction de son téléphone portable abandonné sur la table basse. Mais comme il ne donne pas l'impression de vouloir s'en saisir, Genesis le fait à sa place et, sans lui demander la permission, entreprend de fouiller dans ses messages. Celui de Tseng n'y figure plus, mais il n'en est pas tellement surpris.
— Il me demandait, reprend Sephiroth, au moment où Genesis abandonne à nouveau le téléphone sur la table basse. Si j'étais au courant de l'existence de ces enfants… qui me ressemblent.
— Des enfants qui te ressemblent ? répète Angeal.
— Ceux qui sont en cet instant dans ta chambre, n'est-ce pas ? devine Genesis. Même si ça ne nous explique toujours pas comment ils se sont retrouvés là.
Et au fond de lui, la curiosité se fait plus envahissante que jamais.
— Je ne comprenais pas ce qu'il me disait, alors… je lui ai demandé de quels enfants il parlait. Mais je n'ai pas eu de réponse. J'ai eu beau le relancer plusieurs fois, il est resté silencieux après ça. Et comme je ne savais pas où le trouver, je…
Sur la fin, sa voix se bloque dans sa gorge et refuse d'en sortir. Puis il ferme les yeux, désireux d'oublier le monde qui l'entoure. Comment une chose pareille a-t-elle pu arriver… ? Et comment a-t-il fait pour que… tout ce temps… ?
— Ils sont si petits… !
Et dans sa voix, une douleur que ses amis ne sont pas habitués à entendre chez lui. À nouveau, il se prend la tête entre les mains, retrouvant la position dans laquelle ils l'ont surpris à leur arrivée. S'ensuit le silence.
De plus en plus déroutés, Angeal et Genesis restent un moment sans trop savoir que faire. Puis Angeal, devinant qu'arracher ses confessions à leur ami risque d'être long, annonce :
— Je vais nous faire du café, d'accord ? Seph', ne te force pas. On restera avec toi le temps qu'il faudra.
Là-dessus, il se dirige en direction de la cuisine et jette au passage un regard à la porte de la chambre. Toujours close, aucun bruit ne se fait entendre derrière. Ni voix, ni pleurs, comme si la pièce était parfaitement vide. Mais au vu de la détresse de Sephiroth, il est clair que celui-ci n'est pas en train de leur monter un char.
Il peut sentir la curiosité s'éveiller en lui. Il a dit qu'ils étaient trois… trois enfants… encore petits… à quoi est-ce qu'ils peuvent bien ressembler ?
Et s'ils sont si jeunes, est-ce vraiment une bonne idée de les laisser seuls ?
Il finit néanmoins par passer son chemin en haussant les épaules, songeant qu'il y a de grandes chances pour que les petits soient en train de dormir. Ce qui expliquerait l'absence de raffut et puis…
Si j'essaye de rentrer là-dedans, ça risque de créer des problèmes. Et je ne crois pas que ce soit le moment de jouer avec ses nerfs.
Sur le canapé, Genesis le suit des yeux, avant de revenir à Sephiroth, qui n'a toujours pas changé de position.
C'est bien la première fois qu'il le voit aussi ébranlé. Il a presque l'air fragile et il lui fait tant de peine qu'il le prendrait bien dans ses bras pour le consoler, s'il n'était pas déjà certain que son geste serait mal reçu. À la place, donc, il lui passe une main dans le dos, en une caresse qu'il aurait voulue de réconfort, mais qui ne parvient au final qu'à faire se crisper son ami. Un soupir lui échappe. Il sait qu'il n'aime pas être touché, mais parfois ce trait de sa personnalité peut vraiment être frustrant.
— Viens, on sera mieux dans la cuisine…
Et si la proposition est un peu stupide, l'atmosphère régnant dans le salon est si étouffante qu'il ressent un besoin impératif de changer de décor – même si celui-ci se résume à se déplacer dans la pièce suivante.
En réponse, Sephiroth opine du chef. Et comme il se remet maladroitement debout, Genesis tend une main dans sa direction – comme il craint qu'il ne fasse pas deux pas sans s'écrouler –, avant de se rétracter. Là aussi certain que ce geste ne sera pas bien reçu. C'est donc en pestant intérieurement qu'il marche en direction de la cuisine, tout en s'assurant que son ami le suit.
Là, ils trouvent Angeal occupé à leur préparer du café. Comme il les voit entrer, il hausse les sourcils en signe d'interrogation. Genesis se contente de lui répondre d'un haussement d'épaules, avant de se tourner vers Sephiroth qui, visiblement en pilote automatique, s'installe à table.
— Est-ce que tu as mangé à midi, au moins ?
Il faut quelques secondes à l'interrogé pour comprendre la question et secouer la tête.
— Non, mais…
— Alors il faut que tu avales quelque chose, déclare d'autorité Genesis. Je vais m'en occuper !
Puis il ouvre le frigidaire, et peste cette fois tout haut en le découvrant presque vide. Angeal lui envoie une claque sur le bras et lui apprend :
— Je dois avoir quelque chose chez moi. Je reviens…
Le laissant de nouveau seul et complètement démuni en compagnie de Sephiroth.