Disclaimer : Kill Ben Lyk est l'oeuvre d'Erwan Marinopoulos, de Jean-Christophe Establet et d'Oliver Maltman.

Résumé : Elle avait toujours eu une vie des plus normales. Enfin, ça, c'était avant de rencontrer l'homme au nom désormais plus dangereux que celui de Sarah Connor. [Kill Ben Lyk]

Note de l'auteur : Ceci est une réponse au défi 87 de la page facebook « Bibliothèque de Fictions », un défi que je trouvais si riche que je ne pouvais pas rester sur un OS : cent mots minimum, votre personnage rentre chez lui sauf que, quand il ouvre la porte d'entrée, il se rend compte qu'il n'est pas chez lui !

Avertissements : Je spoile le film. Non vraiment, je le spoile, je reprends à la fin du business en fait! Genre sévère, je prends le film et je mets une musique clichée de strip-tease! Donc, si vous n'avez pas vu Kill Ben Lyk et que vous ne voulez pas vous gâcher la surprise, allez le voir et revenez ensuite! Et il y a un self-insert, juste parce que je peux en fait. Mais bien sûr, le nom de famille que je me donne n'est pas celui que j'ai en vrai, faut pas déconner non plus. Et j'enjolive ma vie, tant qu'à faire!

Kill Michel Girard

Chapitre 1

Poussant un soupir lié à l'effort parce qu'elle portait une valise assez lourde, Marina sortit ses clés de sa poche, pas mécontente d'être enfin rentrée à la maison. Ce voyage en Irlande, pour visiter Loftus Hall, avait été magique mais épuisant.

Et stressant.

Parce que, pour aller au bout du délire, elle avait payé pour visiter l'un des manoirs les plus hantés du Royaume-Uni de nuit !

Même en tentant d'être rationnelle, il y avait dans cette maison quelque chose de particulier, de malsain, qui l'avait mise terriblement mal à l'aise. Elle y était retournée le lendemain, de jour, pour juste profiter du magnifique lieu de tournage de The Lodgers. Son acteur préféré avait joué le rôle de Sean, le jeune vétéran de la guerre d'indépendance d'Irlande.

- Faut vraiment que je consulte... Je m'inflige des trucs pas possibles au nom de mon statut de fangirl... Pensa-t-elle tout en tournant sa clé dans le barillet

Elle entra, posa machinalement le trousseau dans un vide-poche avant de se figer :

Quelqu'un était entré chez elle pendant son absence !

Elle vivait seule et n'avait confié le double de ses clés qu'à ses parents, son père voulait s'assurer qu'elle ne raterait pas une information importante du notaire comme elle était en projet de déménager, sa mère voulant arroser ses plantes. Elle était partie en laissant un appartement propre.

Mais ce qui la saisit le plus était que ce n'était clairement pas un cambriolage.

Rien n'était cassé, la pièce était rangée. Cependant, la chose était indéniable : quelqu'un vivait chez elle quand elle n'était pas là ! Dans l'évier traînait une assiette avec de la sauce qui se solidifiait, il y avait une veste nonchalamment jetée sur le dos de son canapé, un portable en charge sur une prise...

Une veste un et un téléphone qui n'appartenaient pas à ses parents.

Ou même à son frère cadet, s'il avait accompagné son père ou sa mère, pour une raison quelconque.

Certaines de ses propres affaires avaient été bougées, rangées dans des cartons. Elle laissa sa valise près de la porte, sortit son cellulaire, prête à appeler la police. Elle entendit du bruit venant de la pièce adjacente. Malgré une peur grandissante et qui se répandait dans chaque fibre de son corps, elle se surprit à ne pas crier d'effroi, au contraire, elle se saisit d'une poêle sale qui avait été laissée sur un plan de travail dans sa cuisine. Les pas de rapprochaient de plus en plus et elle avançait sur la pointe des pieds. Elle avait l'impression de se retrouver sur le tatami de son club de judo, pendant ses entraînement, sa voûte plantaire glissant le long de la toile qui recouvrait les carrés de paille compressés. Elle entendit alors deux voix, un homme et une femme, laquelle parlait en anglais avec un accent français à couper au couteau mais un vocabulaire impeccable. L'homme, lui, avait l'accent purement british. De plus en plus étrange... La porte s'ouvrit doucement, elle était juste derrière. Au moment même où la première personne sortait, fermant à moitié les yeux par réflexe, Marina fit balancer ses bras, assénant un coup de poêle à frire à l'indésirable ! L'ustensile le frappa en plein dans la figure, sur la tempe gauche et elle entendit alors un cri de douleur.

- Oh my God ! S'écriait une voix masculine et aiguë.

Elle rouvrit les yeux complètement. A ses pieds, sa main portée sur l'endroit endolori, un jeune homme qui devait avoir son âge ou légèrement plus jeune, gémissait et elle ne l'avait pas manqué. Le coup ressortait déjà. Le deuxième intrus déboula : une policière. De plus en plus bizarre !

- On peut savoir ce que vous faites ?! Lança l'agent de police

- Je pourrais vous retourner la question ! Répliqua la jeune femme, trop remontée pour réaliser qu'elle parlait mal à un représentant de la loi. Je suis chez moi ici ! C'est mon appartement !

- Oh, pas de ça avec moi, ne faites pas d'histoire !

Marina lâcha son arme, alla chercher sa carte d'identité et une facture qu'elle avait rangé au préalable dans un tiroir, qu'elle présenta ensuite à la policière. Elle les parcourut des yeux avant de pâlir.

- Mon dieu, la boulette... Ils m'avaient pourtant dit que le 12 de cette rue était libre !

- Je suis entre deux déménagements. Expliqua la locataire. J'attends les papiers du notaire pour finaliser l'achat d'une maison. On vous aura donné des informations trop en avance sur leur temps.

Elle récupéra ses biens. La policière semblait terriblement navrée et surtout embêtée. Le jeune homme était toujours à terre mais ne se plaignait plus. Il avait surtout l'air sonné. Marina s'en voulait presque de lui avoir fait mal mais la seule chose qui l'en empêchait réellement était qu'elle ignorait encore le fin mot de toute cette affaire.

- Je ferai un rapport à mes chefs, vous aurez un dédommagement pour le dérangement, Mademoiselle Leszczynska. Annonça la policière

- Merci, c'est gentil. Dit-elle. Mais j'aimerais tout de même savoir ce que vous faisiez chez moi ! Et comment vous avez pu entrer ? Seuls mes parents ont un double ! La serrure n'est pas forcée non plus.

- La police est équipée. Répondit sobrement son interlocutrice. Ce jeune homme est sous protection policière et on nous avait dit qu'il pouvait loger ici comme la dernière locataire était partie.

- Ca ne vous a pas choqué, les meubles ? S'étonna Marina

- On meuble les logements pour les cas comme Monsieur.

La jeune femme observa le garçon qui se relevait doucement, un peu chancelant. Elle avait dû y aller sacrément fort ! Il ne lui paraissait pas bien méchant ou dangereux et l'espace d'un instant, elle se demanda ce qu'il avait pu faire pour en arriver là. Il avait une figure aux traits assez doux, encore un peu enfantin, dans un corps svelte mais clairement adulte. Il lui semblait d'ailleurs familier mais elle n'arrivait pas identifier la raison de ce sentiment de déjà-vu.

- Eh merde... Entendit-elle jurer derrière elle

L'agent de police venait de recevoir un message, elle avait très certainement contacté ses chefs à propos de la bévue sur le logement.

- On doit partir, Monsieur. Lança-t-elle à l'anglais.

- What ?

Voyant qu'elle cherchait ses mots, Marin se proposa de traduire.

- The police officer is telling you that you need to go, Sir. Lui expliqua-t-elle

Il la regarda avec des yeux ronds avant de sourire et de lui demander avec une étrange excitation si elle était anglaise, parce que son accent était parfait. Mais son sourire retomba brutalement quand on lui répéta qu'il devait partir. On aurait dit que le ciel venait de lui tomber sur la tête et que le poids du monde était sur ses épaules. Il bégayait qu'il ne pouvait pas partir, que c'était impossible.

- On peut m'expliquer ce qu'il se passe ?! Lâcha Marina, qui commençait à perdre le peu de patience qu'elle avait réussi à réunir au plus profond d'elle.

La policière la prit à part.

- Connaissez-vous l'affaire Ben Lyk ? Lui demanda-t-elle une fois seules.

Marina acquiesça. Cette histoire était aussi sordide qu'absurde. Quelques mois auparavant, à Londres, en deux jours, deux hommes du nom de Ben Lyk avaient été assassinés et la seule chose qui liait les victimes était leurs noms. Le premier était un homme d'une quarantaine d'années retrouvé mort dans une armure médiévale, sa maîtresse à ses côtés, une balle dans la tête en guise de nouveau diadème. Le second, un homme malade, hospitalisé, sous respirateur artificiel, achevé par la même méthode. Et le lendemain, dans une maison éloignée de la capitale, on avait retrouvé les cadavres de plusieurs hommes, de quelques femmes, notamment des officiers de Scotland Yard.

Et les civils répondaient tous au nom de Ben Lyk.

Un serial killer sévissait et tuait, pour une raison qu'elle ignorait, tous les gens ayant ce nom, un nom désormais plus dangereux que celui de Sarah Connor. Elle s'imaginait un tueur un peu con sur les bords, qui se plantait à chaque fois de Ben. C'était comique dans le fond. Jusqu'à ce que la presse révèle que le meurtrier était après une personne nommée Ben Lyk parce qu'elle avait filmé puis diffusé sur le net, lors du massacre du cottage, une vidéo d'une exécution mafieuse qui datait de quelques semaines. Dans sa fuite, il avait perdu une carte nominative mais sans photo. Des innocents avaient été arrachés à leurs proches pour avoir eu le malheur de s'appeler comme cette courageuse (ou inconsciente, cela dépendait des avis) âme.

- Ce jeune homme est le dernier Ben Lyk encore en vie. Révéla-t-elle

La locataire la dévisagea, son expression passant de la neutralité à une espèce de mélange de surprise, d'effroi.

- Et s'il est ici, cela veut dire que...

- Que le tueur court toujours, oui.

- Et vous l'amenez chez moi ?!

Elle ne s'était pas rendue compte qu'elle avait crié. On amenait chez elle un homme en danger de mort, ce qui la mettait en danger par extension. Tout ça parce qu'on avait pas été foutu de vérifier ses infos avant de l'installer ! L'assassin ne s'embarrassait pas des personnes qui gravitaient autour de Ben Lyk, il les abattait aussi froidement que les autres et Marina n'avait pas envie d'allonger sa liste . Elle n'avait que vingt-sept ans ! Elle voulait encore vivre plein de choses ! Réaliser tant de projets !

- Faites-le partir ! Exigea-t-elle immédiatement

- Nous nous renseignons sur les appartements vacants. L'informa-t-elle. Le but est d'offrir à Monsieur Lyk une nouvelle identité, une nouvelle vie, le temps que nous arrêtions le tueur et que nous démantelions le gang.

- Dunkerque n'est pas si loin de Londres...

- Nos sources nous assurent que c'est une ville sûre.

La porte derrière elles s'ouvrit et Ben passa la tête par l'interstice.

- Sorry, looking for the bathroom. Il s'excusa, l'air penaud.

Marina soupira, prit brièvement congé de la policière et amena Ben devant la porte. Cependant, une fois la représentante de l'ordre hors de vue et d'ouïe, l'expression du jeune homme changea du tout au tout.

- S'il vous plaît... Tenta-t-il dans un français chevrotant et mal assuré. Ne me jetez pas dehors !

Ses yeux, d'un bleu magnifique, étaient teintés par la peur.

- Vous comprenez le français ? S'étonna la jeune femme en haussant un sourcil.

- Oui un peu... J'aime pas parler la français parce que je ne suis pas bonne... Admit-il.

- C'est plutôt pas mal. L'encouragea-t-elle avec douceur avant de se fustiger

Elle voulait qu'il se barre et voilà que sa nature de bonne poire reprenait le dessus !

- Ne me jetez pas dehors... Répéta-t-il. Ici, c'est la dernier appartement disponible... Les hôtels m'ont refusé. Trop dangereux pour les clients.

- Je suis navrée mais ça n'est pas mon problème ! Répondit-elle douloureusement. Si c'est dangereux pour eux, ça l'est pour moi aussi, pour ma famille qui vit dans cette ville !

- Madame Bourgeois, la policewoman, dit que ici, c'est okay. A Dunkirk. Et j'ai un faux nom ! Personne ne sait le vrai, sauf vous et la police.

Elle eut un rictus qui le surprit.

- Vous êtes Youtubeur. Lança-t-elle.

Entre temps, avec la révélation de son nom, Marina avait fini par comprendre pourquoi Ben lui semblait familier. Il était un jeune vidéaste qui commençait à percer sur Youtube, créateur de la chaîne I am Ben Lyk.

- Un Lyker ? S'enquit-il, une lueur d'espoir dans le regard. Vous aimez mes vidéos ?

A la vérité, elle n'en avait pas vu beaucoup, quelques-unes en recommandation, qu'elle avait regardées par curiosité. Des vlogs assez creux, vides, avec une impression qu'il surjouait beaucoup, l'archétype de l'homme qui voulait peser dans le milieu, avec pourtant un peu de sa personnalité qui transparaissait : quelqu'un avec qui on pouvait rire facilement.

- Je ne suis pas très vlogs. Répondit-elle avec diplomatie. Mais le fait est que, même avec un faux nom, des gens peuvent vous reconnaître. Vous balancer sur les réseaux sociaux. Vous auriez mieux fait de vous enterrer... je sais pas moi... A... A Gussignies !

Gussignies était un petit village des Hauts-de-France, d'à peine trois cent cinquante habitants et extrêmement rural. L'endroit idéal pour se faire oublier ! Le frère de Marina disait d'ailleurs que c'était le trou du cul du monde tellement c'était petit. Avant d'apprendre qu'il existait un village dans le Pas-de-Calais qui comptait littéralement quinze personnes.

- Scotland Yard a demandé l'aide de Dunkirk... Je dois rester dans la ville... Ecoutez... J'ai pas de jobs encore mais... Je peux être le maid ! Proposa-t-il, clairement désespéré. Je peux cuisiner ! Laver ! Je sais conduire !

Elle eut un sursaut quand il se mit à genoux face à elle, les pupilles implorantes, avec un air de chien battu.

- J'ai un peu d'argent aussi ! Et si c'est pas assez, je peux payer avec moi !

Marina sentit sa mâchoire craquer alors que sa bouche s'ouvrait sous l'effet de la stupeur. Est-ce qu'il venait de lui proposer de l'héberger en échange de ses prouesses au lit ?! Elle se pinça discrètement, la journée était juste surréaliste, c'était impossible que tout cela se passe ! Elle rêvait ! Sauf qu'elle avait mal. C'était vrai. Un témoin en fuite, expatrié, planqué chez elle par erreur, était prêt à se prostituer pour avoir le gîte et le couvert.

- Non mais ça va pas ?! S'exclama-t-elle. J'ai une tête à faire ça moi ?!

Elle réfléchit un instant. Qu'est-ce qui allait arriver à ce garçon si elle disait non ? Il allait sans doute devoir vivre dans un commissariat le temps qu'un logement se libère. Et s'il était la même personne que ce qu'il prétendait être dans ses vlogs, cela allait être la police de Dunkerque qu'on allait arrêter pour meurtre. Elle se l'imaginait, entre ces murs blancs et aseptisés. Complètement perdu, comme un chiot qu'on abandonnait à la SPA parce qu'il avait pissé dans les chaussures de la maîtresse de maison.

- Ca n'est pas mon problème... Tenta-t-elle de se convaincre.

Mais elle se connaissait, c'était trop tard. Elle était de celle qui se souciait vite. Elle n'arriverait pas à l'oublier.

- Relevez-vous... Dit-elle. C'est quoi, votre nouveau nom ?

- Michel Girard !

Elle roula ses yeux. Ils n'avaient pas trouvé mieux, à Scotland Yard ?! Oui, c'était le nom français le plus générique au monde mais qui allait croire qu'un jeune homme, clairement étranger, à l'accent londonien, s'appelait Michel Girard ?!

- Mon papa est français mais a épousé une anglaise, voilà pourquoi le nom et l'accent. C'est ce qu'on m'a dit de dire quand j'ai arrivé à Dunkirk.

La policière sortit, jugeant que c'était bien long pour aller poser sa pêche. Ben regarda Marina une dernière fois, son regard l'implorant de ne pas le laisser seul. Et à ce moment précis, elle se détesta pour ce qu'elle allait faire, cette décision qu'elle savait stupide, dangereuse, suicidaire.

- Il n'a vraiment nulle part où aller ?

On le lui confirma, tout comme son idée qu'il resterait au commissariat pour un temps. Ca n'était pas une vie ça. Il fuyait pour survivre, en abandonnant tout, en sachant que des dizaines de personnes étaient mortes en son nom. Elle se maudit, elle, et son cœur trop bon et donc trop con.

- Il peut rester ici. S'entendit-elle dire

Le visage de ben s'éclaira mais se ternit aussi sec quand il vit son air sérieux.

- Il peut rester si vous me confirmez que je ne risque rien, que ma famille ne risque rien, que mes amis ne risquent rien ! Quitte à ce qu'on nous mette sous surveillance !

- Mademoiselle... Déclara la policière. Vous nous retirez une sacrée épine du pied ! J'en parle à mes supérieurs sur le champ mais il est évident que toutes vos conditions seront acceptées ! Votre famille, vos amis, vos proches, vous-même, vous serez protégés au maximum des capacités de la police de notre ville. Au nom de mes collègues et de nos pairs de Scotland Yard, je ne peux que vous remercier.

Ben lui tapota l'épaule, demandant ce qu'il se passait, car il ne comprenait pas tous les mots.

- Je suis d'accord. Vous pouvez restez.

Il poussa un immense soupir de soulagement et l'enlaça avec chaleur.

- Oh, thank you, thank you, thank you !

Elle avait eu un léger mouvement de recul avant de lui rendre brièvement l'étreinte. Et alors qu'elle s'excusait pour ranger sa valise dans sa chambre, une fois la porte fermée, elle se laissa tomber le long du mur, vidée.

Dans quel merdier s'était-elle encore fourrée ?!

FIN