Ce texte est une participation à un défi d'écriture sur le thème « les vacances du héros ». Il incorpore également le défi secondaire du point de vue extérieur via des OC et un léger crossover. Je n'ai pas réussi à en faire totalement la crackfic prévue.
Pas de Destiel, pas de slash, pas de sexe. Juste une pause choupie un peu folle dans la dure vie d'une longueur d'ondes multimensionnelle animée d'une intention céleste.
Pitch : L'Ange du Seigneur Castiel a connu une année bien difficile. Pensant bien faire, ses amis humains les chasseurs de démons Winchester & Winchester, l'ont encore laissé tout seul "se reposer"… alors qu'il commence à développer une réaction ambivalente en restant livré à lui-même…
Pour éviter un nouvel assaut de souvenirs horribles, il se décide sur un coup de tête à (fuir) prendre quelques jours de vacances au soleil, et opte pour l'échange de maisons. Il trouve un ange inconnu miraculeusement intéressé qui semble fiable, lui file les clés du bunker et part à Hawaï. Sur place, quelques ados qui flairent le bon pigeon, s'autoproclament coachs en vacances idéales…
.
PAS DE REPOS POUR LES BRAVES
Une fanfiction Supernatural, par OldGirl Nora Arlani
Invités spéciaux : un ange et un démon de chez Good Omens
1ere prélecture : merci à Alienigena
.
A louer : Exceptionnel ! Idéal pour séjour reposant au cœur du Kansas. A quelques kilomètres d'une bourgade offrant toutes commodités, charmant blockhaus atypique des années 30, décoration d'origine, 30 pièces (dont séjour, vaste bibliothèque, salle de briefing, cuisine équipée, salle d'interrogatoire, armurerie, infirmerie, 6 salles de bains, et grand garage pour voitures de collection). Nombreuses protections magiques incluses.
Castiel se recula un peu sur sa chaise pour relire son annonce sur le site echangedemaisons .com. Il considéra les murs de briquettes claires de la grande bibliothèque sous voûte où les trois grandes tables en bois ciré s'ornementaient de lampes aux abat-jours carrés et décida de joindre quelques photos. Il relut encore et après réflexion, rajouta « home cinéma », ce qui attirerait certainement plus de monde…
C'était décidé. Puisque les Winchester l'avaient encore laissé tout seul à garder le bunker pour une durée indéterminée, pourquoi ne pas prendre quelques jours de vacances au soleil ? Résolu, il appuya sur la touche Entrée de l'ordinateur et, la main appuyée sur la joue et le coude sur la table, commença à attendre d'éventuelles réponses.
.o.
CASTIEL ET LES SURFEURS D'ARGENT
Techniquement, il n'avait pas vraiment quitté le territoire : Hawaï était encore aux États-Unis. Et au moindre problème, il pouvait toujours revenir d'un coup d'aile… Pas vrai ?
La vérité, c'était qu'il ne comprenait pas comment quiconque ait pu trouver « excitant » d'échanger le bunker perdu en rase campagne contre un emplacement sur une île paradisiaque.
Une part de lui se moquait toutefois complètement de la réponse. D'indélébiles et perturbants souvenirs impliquant Lucifer, le hantaient toujours sournoisement lorsqu'il restait seul. Et plus il restait seul, plus il y repensait… C'était là certainement la raison pour laquelle il avait impulsivement choisi ce piège à touristes quand les Winchester avaient refusé une nouvelle fois de l'emmener.
.
Ses chaussures noires crissaient sur la langue de sable doré, qu'une mer impossiblement cyan venait taquiner paresseusement. Le soleil déclinant restait toujours ardent mais un léger souffle d'air doux, provenant du large, venait chatouiller plaisamment la peau pâle des joues rugueuses de l'ange. Il prit une minute pour gorger ses yeux jusqu'à l'ivresse de la luxuriante et simplissime beauté du paysage, qui lui rappelait le monde tel qu'il était, au Commencement de la Création.
Plissant les paupières pour filtrer les rayons, il distingua sur l'eau des vacanciers tapageurs barbotant à plat ventre sur une planche de surf. Ils riaient à perdre haleine, en revenant au bord de la petite anse retirée où il avait atterri.
Alea jacta est.
Les quatre jeunes gens, tous aussi blonds et bronzés que dans une publicité pour chewing-gum évoquant la fraîcheur de vivre, sautèrent dans l'eau et se mirent à courir vers lui à grand renfort d'éclaboussures, en pointant son imperméable et son costume sombre qui les faisaient beaucoup rire.
— Haloaaaa ! s'écrièrent-ils en chœur.
Ils accouraient à toute vitesse, comme si progresser à cette allure dans le sable n'était pas une opération exigeant des mollets surhumains et une coordination supérieure pour avoir l'air gracieux. Et le premier arrivé, mince et longiligne, se planta devant lui pour le dévisager curieusement avant de demander, hilare :
— Mais qu'est-ce que tu fous là dans cette tenue, mec ? Tu planes ou quoi ? Il fait 35° à l'ombre !
D'un œil soigneusement inexpressif, Castiel considéra son costume sombre et son imper, dont la couleur était pudiquement désignée par « mastic » (Ouais, beige crade, commentait quelquefois Dean. Tu pourrais quand même le passer à la flotte de temps en temps). Il débattit intérieurement sur l'opportunité de signaler que : et d'un, non il ne « planait » pas (il avait effectivement à battre des ailes pour faire le déplacement jusqu'ici) et de deux, la chaleur ne l'affectait pas. On aurait en vain cherché sur lui la moindre goutte de transpiration – une plaie humiliante parmi de nombreuses autres tares que la condition humaine souffrait stoïquement jusqu'à la trouver « normale ». A son avis, Dieu aurait connu une rébellion d'un tout autre calibre si les anges avaient dû endurer une seule de ces infirmités, eux aussi.
Évidemment, cela pouvait arriver. En cas de mauvais sort lancé par une puissante sorcière. Ou d'empoisonnement foudroyant par le venin d'une arme spéciale, ou ce genre de choses qui en général ne courait pas les rues, mais en particulier foisonnait dans son quotidien depuis qu'il servait de mascotte aux Winchester.
En face de lui, le jeune garçon aux cheveux coupés en brosse comme Dean, guère impressionné, semblait toujours attendre patiemment une réponse.
— Je viens tout juste d'arriver, plaida l'ange en lançant son inusable petit regard perdu et soucieux à la fois.
Les jeunes filles qui s'avancèrent ensuite, gloussèrent et se trémoussèrent dans leurs maillots de bains fluo des plus ajustés, lesquels révélaient tout autant des lignes harmonieuses que la pauvreté navrante de leurs géniteurs n'ayant manifestement pas les moyens d'en acheter à leur taille.
— Ouh, regarde-moi ces yeux, India ! Tu le trouves pas mignon, pour son âge ? Et cette petite fossette, oh mon Dieu ! Est-ce que t'en as… ailleurs ? demanda-t-elle avec un sourire qu'il n'était pas sûr de trouver innocent.
Par réflexe, l'intéressé recula prudemment d'un pas. Le second garçon, portant un short long au motif graphique, s'approcha assez pour lui flanquer un coup sur l'épaule.
— Aouch, man, t'as des deltoïdes en béton... fit-il en secouant sa main. Faisons les présentations. Je m'appelle Paulho, lui c'est Marco et les deux curieuses là, c'est India et Denitza. Hey relax ! Elles vont pas te manger. T'es mormon ou quoi ? Si tu veux éviter qu'elles n'aient à te réanimer sous peu, tu ferais bien de virer tout de suite quelques épaisseurs... Sinon, t'as un endroit où crécher ? Tu peux venir avec nous si tu veux, je crois qu'elles t'ont à la bonne…
Castiel hésitait. Sa décision était prise mais soudain, mais la barre lui semblait un peu haute et il se surprit à balancer entre tergiversation et procrastination... Desserrant sa cravate bleue d'un très relatif centimètre, il déglutit et opina en levant un morceau de papier plié qu'il avait entre deux doigts.
— Oui, oui, j'ai l'adresse là ! Je… je vais y aller, m…merci bien.
Le deuxième garçon (Marco) avait les cheveux plus longs que Sam et venait de les attacher avec un élastique en toupet ridicule. D'autorité, il orienta le papier dans la main de l'ange pour mieux lire… avant de s'esclaffer.
— Wah putain, mec ! Tu te refuses rien, tu dois être vraiment blindé. Si tu veux on t'accompagne, hein ? Tu sais où c'est ? Il a un lodge au Hilton Waikoloa Village, articula-t-il silencieusement pour ses trois camarades.
Le sourire mimétique des deux filles s'élargit à un degré inquiétant. Le prenant chacune par le bras, elles se mirent à l'entraîner Dieu savait où. Elles semblaient réticentes à l'idée de le laisser se débrouiller alors qu'il « débarquait » et qu'on puisse « profiter de lui ».
— Évidemment, on ne peut pas laisser faire ça ! abonda roublardement leur camarade Paulho. En plus, on n'avait pas de brun dans l'équipe… Allez, c'est réglé, c'est sur notre route, on va t'emmener. Notre bagnole est par là-bas…
.
Avec un rien de réticence, Castiel se laissa emmener par la troupe d'enfants (soit, peut-être n'étaient-ils pas exactement des enfants mais considérant son propre âge, ils restaient vraiment très jeunes) vers ce qui ressemblait à la voiturette électrique de Barbie à côté de la Chevrolet 67 de Dean. La chose était garée de biais sous trio de palmiers en bordure d'une route.
Ouvrant le coffre pour y chercher quelque chose, le dénommé Paulho, qui avait l'air d'être le chef naturel de ces humains, annonça :
— Dernier détail à régler pour que tu te fondes mieux dans le décor et ne te liquéfies pas sur la banquette…
Pointant l'ange, il claqua des doigts et fit signe aux autres qui opinèrent – ce qui était vaguement inquiétant. En un rien de temps, le nouveau venu effaré se trouva dépouillé de son trench, sa veste, sa chemise, son maillot de corps en pur coton bio, par trois jeunes enthousiastes qu'il n'osait pas repousser vertement de peur de les blesser. Pourtant, lorsque qu'une des filles avança une main des plus hardies pour défaire sa boucle de ceinture, il bloqua son poignet fermement avec cependant un petit cri d'effroi.
Depuis le coffre ouvert qui ressemblait à la gueule béante d'un Léviathan, Paulho poussa un tout différent cri de triomphe. Sortant de là, il testa l'élasticité d'une pièce de tissu bleu qu'il levait devant ses yeux pour mieux l'observer à la lumière.
— Ah le voilà ! Impec ! Tiens, ça doit être à peu près ta taille, présuma-t-il en le lui lançant joyeusement.
A moitié déshabillé, un Castiel désemparé attrapa le short de bain par réflexe et d'une seule main. Il y avait gros à parier qu'il s'interrogeait sur les pratiques suspicieuses consistant à partager des vêtements de corps avec des inconnus. Mais lesdits inconnus ne s'arrêtaient pas à des considérations aussi triviales.
— Eh bah, vas-y, passe-le qu'on voit ce que ça donne. Tu seras mieux que dans ton costard.
Castiel ouvrit la bouche et la referma… tandis qu'il tâchait de ne pas rougir de confusion sous les yeux brillants qui le détaillaient en ayant l'air d'apprécier ce qu'ils voyaient. Il serra ses affaires contre lui, en fragile rempart contre leur curiosité débordante.
— Euh, on ne fait plus de… cabines de plage depuis un siècle, c'est ça ?
Les deux garçons se consultèrent sans qu'une étincelle d'intelligence ne brille dans leurs pupilles. Puis devant les coups d'œil embarrassés que Castiel adressait aux deux surfeuses, Paulho finit par additionner deux et deux.
— Okaaayy ! J'avais pas compris… Les filles, retournez-vous, demanda-t-il en déclenchant un concert de protestations boudeuses de leur part.
— Euh non mais… pas qu'elles ! Vous tous ! s'exclama l'ange comme s'il trouvait incongru d'être obligé de le préciser.
Désopilés par sa pudeur, les enfants s'exécutèrent en riant, non sans tricher, et Castiel devina qu'ils se moquaient bien de lui. Cependant, il n'avait pas perdu l'habitude d'être charrié par les Winchester sur ce qu'il faisait toujours de travers…
L'ange n'avait jamais rien trouvé à redire au corps de Jimmy Novak qui était un très bon vaisseau, robuste, très fiable, qui lui faisait un usage remarquable depuis plusieurs années. Mais pour ce qui était de l'exposer à la vue d'inconnus, il préférait la parcimonie.
— Bon tu rentres ou pas ? s'impatienta l'un des garçons qui se retourna bientôt imité par son camarade.
Menton pincé entre deux doigts, les jeunes se reculèrent d'un pas pour admirer leur œuvre d'un œil critique avant de hocher la tête d'un air satisfait. Le maillot était un peu étroit aux hanches mais faisait tout ressortir à merveille – particulièrement le bleu des yeux.
— Bah, t'as vraiment pas de quoi rougir, mon gars ! commenta Paulho. T'es encore pas si mal pour un « plus trente ». Tiens, mets ces lunettes de soleil et ébouriffe un peu tes cheveux sur le dessus…Déjà, t'auras l'air plus cool… Marco, va voir s'il y a du gel dans le sac. Il lui reste des tifs mais ça fera plus de volume… Pour le reste, ajouta-t-il en confidence, on va pas se mentir : tout est une question d'attitude.
— D'attitude ? répéta lentement Castiel sans comprendre. Et... euh, quel reste ?
— Écoute, on va pouvoir faire de toi un tombeur, mais va falloir que t'y mette un peu du tien… Après quelques verres, normalement, tu devrais être plus marrant.
— Un quoi ?
L'ange qui ne transpirait pas sentit soudain une fine goutte de sueur perler au-dessus de sa lèvre supérieure. De surprise, il laissa Marco lui mettre un peu de gel et finir par des lunettes de soleil sur le nez.
— Est-ce qu'on peut voir maintenant ? trépignaient les deux filles.
— Ouais, c'est bon, vous pouvez ! Tadaaa…
— Hiiiiii ! firent-elles en se tapant dans les mains en signe de victoire. Trop. Bonne. Pioche !
.
Castiel ne voyait pas le rapport entre son apparence démunie et une pioche, à part peut-être le pic hasardeux que formaient maintenant ses cheveux sur sa tête. Mais les jeunes filles semblaient ravies, donc c'était peut-être de bon augure.
— Ok, fit l'un des garçons (il ne savait plus lequel). Sors les épaules, rentre le ventre et marche comme si le monde t'appartenait au son d'une musique lente trop cool. Vas-y, essaie un peu qu'on voie…
L'ange du Seigneur prit une profonde inspiration, donna une tape sur les mains des filles qui lui palpaient un peu trop familièrement les biceps et les pectoraux et secoua ses vêtements pleins de sable pour tenter de les replier nettement.
— C'est ridicule et inutile, protesta-t-il. Je suis juste là pour me reposer un peu…
— Mhh… non, ronronna l'une des filles. Pas ridicule du tout qu'est-ce que t'en dis, Denitza ? Est-ce que notre ami le timide est ridicule ? Moi, je ne dirais pas ça…
— Moi non plus, trancha Marco. A ce détail près qu'il est blanc comme un cul ! Si tu veux faire partie de la bande, tu vas pas y couper ! Demain, à la première heure, c'est la cabine de bronzage obligatoire pour toi !
— Mais… croassa Castiel.
— Allez, discute pas, monte à l'arrière. On va déposer ces trucs dans ta piaule, et ensuite, direction la fiesta. Et, foi de Paulho, je te garantis, que tu vas pas rentrer tout seul cette nuit, coco !
.
(à suivre)
.