Enfin.

Cupidon est né je crois en 2017 si je me fie au document words. Je l'avais commencé sans trop savoir ou j'allais. Contrairement aux autres histoires que j'écris je n'en connaissais pas vraiment la fin et c'est peut-être pour ça que j'ai mis autant de temps à la terminer.

Il y a des histoires qui coulent de source, vraiment, comme summertime Madness qui était limpide dans ma tête.

Et d'autres qui même si elle demande à mon cerveau plus de réflexion qui sont faciles à pondre, exemple : Le phénix ne brûle jamais.

En revanche elle n'est pas hum...pleine de rebondissement. Elle est simple.

Bien évidement c'est un DRARRY. Donc recommandation d'usage, homophobe et frileux des relations homosexuels abstenez vous.

Pour des raisons qui ne tiennent qu'à moi, je ne tiens pas compte du dernier chapitre d'Harry Potter et les reliques de la mort "19 ans plus tard".

Je crois que c'est une histoire un peu triste aussi. Sur la vie, sur la guerre.

Sur le pardon.

Cette histoire est terminée bien sûr. Mais je n'ai pas d'idée sur les jours de post.

Voilà cher agneaux. J'espère que vous l'apprécierez tout de même.

TITOU DOUH a corrigé cette histoire. Merci à elle! Non, vraiment, merci X).

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CHAPITRE UN

"Ce ne sont pas vos ressemblances qui comptent Harry, ce sont vos différences."

Harry Potter et L'ordre du Phoenix, Dumbledore à Harry.

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On ne pouvait décemment pas débuter une histoire d'amour dans un cimetière. On ne pouvait pas rencontrer l'homme ou la femme de sa vie dans un lieu où se trouvait, juste sous vos pieds, tout un tas de cadavres. On ne pouvait pas rencontrer l'amour devant la tombe de sa femme.

On pouvait, cependant, tomber sur des personnes qui avaient vécu la même chose que nous. On pouvait rencontrer des gens qui avaient connu les mêmes horreurs que nous et venaient se recueillir avec le même visage fatigué et la même tristesse que la nôtre.

Draco Malfoy n'aurait rien voulu de tout ça. Il n'était pas là pour rencontrer l'amour, il ne voulait pas rencontrer l'amour, parce qu'il était persuadé de ne plus le mériter.

Il n'était pas là non plus pour rencontrer des gens comme lui : il n'aimait pas les gens comme lui. Il ne voulait voir personne, et surtout pas des personnes qui savaient qui il était. Mais c'était difficile de ne pas être reconnu ; sa blondeur typiquement Malfoyenne, ses yeux, héritage des Black, sa prestance aristocratique, son air dédaigneux et renfrogné qu'il n'avait presque plus réussi à quitter depuis Poudlard... Comme si le rôle de type effroyable lui collait à la peau. Il était cet ancien mangemort au physique de statue de marbre, il était reconnaissable. Aussi reconnaissable que…

- Cupidon.

Draco Malfoy détourna son regard de la tombe d'Astoria Malfoy, « épouse bien aimée », et tomba nez à nez avec une petite fille. Une enfant aux cheveux de feu et au regard vert, transperçant et familier. Emmitouflée dans un manteau blanc, le visage piqué de tâches de rousseur, ses grands yeux recouverts de cils roux le regardaient avec un air cérémonieux, comme si elle venait de rencontrer l'homme le plus important du monde. Elle s'approcha de lui et ouvrit la bouche dans une moue surprise.

- Tu ne devrais pas être ici ! Tu n'arriveras pas à faire s'aimer les gens dans un cimetière !

- Pardon ?

Draco était abasourdi. Cette gamine déblatérait des phrases qui n'avaient aucun sens pour lui.

- LILY !

La jeune fille sursauta et se tourna vivement. Draco était encore sous le choc de s'être fait alpaguer alors qu'il tentait vainement de se recueillir. Quel genre de père stupide se permettait d'abandonner son enfant et de le laisser embêter les gens dans un endroit si particulier ? Qui que ce fut, Draco se sentait d'humeur à lui faire comprendre sa façon de penser. Il releva les yeux vers l'allée du cimetière et faillit faire un bond en arrière en voyant qui se dirigeait vers lui.

Harry Potter marchait droit sur lui les sourcils froncés, le regard noir. Toujours ce même regard. Draco fit rapidement le lien entre la petite fille et le garçon aux cheveux noirs de jais plus si en bataille que ça et à la peau hâlée. Son visage était mangé par une barbe naissante qui devait sûrement piquer au toucher et il ne portait plus de lunettes.

Pourtant, c'était bien lui. Draco aurait pu le reconnaitre entre mille. Il s'avança sans même le voir et Draco s'en offusqua.

- Combien de fois t'ai-je dit de ne pas t'éloigner de moi quand on vient ici ? Lily, bon sang, tu me fiches une de ces frousses à chaque fois !

La jeune fille attrapa immédiatement sa main, ignorant royalement les remontrances de son père. Elle pointa Draco du doigt.

- Mais Papa, regarde ! Je l'ai trouvé, c'est Cupidon. C'est celui de l'histoire que tu m'as racontée !

- Cu…

Potter leva les yeux vers lui et son visage se figea. Enfin, pensa Draco, on en revenait au même point. Puis l'attitude d'Harry changea. Il ramena sa fille contre lui.

- Lily, ce n'est pas Cupidon.

- Mais siii, dit-elle de sa petite voix aigüe. Tu as dit qu'il était beau et que ses cheveux étaient soyeux et blonds et que ses yeux avait la couleur de la pluie !

Draco vit Potter rougir légèrement ; il en aurait ri si la situation n'était pas aussi surréaliste. Cependant, Potter avait cessé d'être blanc comme un linge et ignorait de nouveau Draco. Comment en aurait-il été autrement, après tout ? Cela faisait plus de neuf ans qu'ils ne s'étaient pas retrouvés presque en tête à tête.

Potter soupira.

- Lily… Réfléchis bien, mon ange : qu'est ce que j'ai dit d'autre à propos de Cupidon ?

La petite fille fronça son petit nez et Draco se surprit à trouver ça adorable.

- Tu as dit… Qu'il avait des ailes et… Et un arc ! dit-elle joyeusement.

- Bien, des ailes et un arc. Maintenant, regarde ce monsieur et excuse-toi de l'avoir dérangé parce qu'il n'est clairement pas Cupidon.

Lily fit la moue mais se tourna de nouveau vers Draco.

- Je suis désolée de vous avoir pris pour quelqu'un d'autre, je ne recommencerai plus…

- Mr. Malfoy.

Draco leva un regard surpris sur Potter, qui venait de prononcer son nom avec révérence. La jeune fille s'empressa de répéter avec sa voix fluette.

- Mr. Malfoy. Je suis désolée.

- Ce n'est pas grave, s'entendit-il dire.

Harry esquissa un mince sourire et prit la main de sa fille.

- Excuse-nous, Malfoy.

Puis il se détourna de lui et entraîna la jeune Lily, qui se tourna une dernière fois pour agiter sa main dans sa direction.

Draco n'en revenait pas. Il venait de croiser Harry Potter et il ne s'était rien passé. Pas de pique venimeuse, pas d'insulte, pas de regard dédaigneux. Rien. Potter avait demandé à sa fille de s'excuser, elle l'avait fait et il avait aussi présenté ses excuses.

Harry Potter s'était excusé, naturellement. Comme s'ils étaient de vagues connaissances. Comme s'ils avaient déjà échangé une fois dans leurs vies un café. Comme s'ils avaient juste été deux élèves dans la même école et qu'ils se souvenaient de l'autre mais sans plus.

Et chose encore plus étrange.e : Harry Potter lui avait souri.

Que s'était-il passé ? Qu'était-il devenu pour n'être qu'un homme qu'Harry Potter pouvait ignorer facilement ? Qu'était devenu Harry Potter pour ne pas se souvenir ?

Draco se rendit compte que ses pensées étaient totalement irrationnelles. Il ne s'était juste pas attendu à ça. Évidement que Potter voulait sûrement ne plus remettre tout ça sur le tapis. Surtout pas ici. Évidement qu'il n'allait pas apostropher Draco en lui demandant si son bras gauche ne le démangeait pas trop. Ça n'aurait eu aucun sens. Surtout après que tant d'années se soient écoulées ; neuf ans, depuis la mort de Voldemort. En neuf années, de l'eau avait largement coulé sous les ponts. Ils s'étaient mariés tous les deux et…

Draco reposa ses yeux gris sur la tombe d'Astoria et des larmes piquèrent ses yeux.

Et après, quoi ?

Astoria, sa femme, était tombée enceinte et avait perdu l'enfant. Dans la foulée, elle était tombée malade pour mourir trois années plus tôt.

Qu'avait fait Potter ? Il avait épousé Ginny Weasley et était devenu auror, d'après la Gazette du Sorcier. Et ensuite ? Il avait une fille, apparemment, qui avait l'air d'avoir cinq ou six ans. Ça, la Gazette ne l'avait pas dit. D'ailleurs, elle ne disait plus grand chose sur Potter.

Draco essaya de se remémorer la dernière fois qu'il avait lu un article sur lui et ne trouva rien dans ses souvenirs à ce propos. Harry Potter n'avait plus fait parler de lui. D'ailleurs, était-il encore auror ? Bien sûr que oui, la presse en aurait parlé, sinon.

Soudain assailli d'un doute affreux, Draco quitta le cimetière et transplana chez lui.

- Draco ? Tu es rentré ?

- Oui, Mère.

Draco jeta son manteau sur le premier canapé à sa portée et se dirigea de sa foulée gracieuse dans le salon. Sa mère prenait le thé, les yeux fixés sur la baie vitrée qui offrait une vue agréable sur le jardin du manoir. Dès qu'il s'assit à coté d'elle, elle tourna ses beaux yeux gris vers lui et lui offrit un sourire chaleureux.

- Excuse-moi de ne pas être venue avec toi.

- Non, c'est bon. Je sais à quel point c'est pénible, ne t'en fais pas.

Il se servit à son tour une tasse et remplit celle de sa mère, déjà vide. Il regarda longuement les volutes de fumée s'échapper.

- J'ai croisé Harry Potter.

Le visage de Narcissa se para d'un étonnement non feint.

- Tu l'as croisé ? Il n'a…

- Rien dit. On s'est à peine salués. Il était avec sa…

Draco ne termina pas sa phrase. Il n'en avait pas le courage. Sa mère avait encore plus mal supporté la perte du fils de Draco. Il n'était même pas né mais elle s'était fait une joie pressante de l'accueillir. Et apprendre la fausse couche d'Astoria lui avait brisé le cœur.

Parfois, Draco se rassurait de voir sa mère plus accablée que lui. Il y avait au moins quelqu'un de triste dans cette maison. Lui aussi avait été détruit de voir qu'il n'aurait pas d'héritier, mais plus que le chagrin de perdre un enfant, c'était l'état dramatique dans lequel sa femme s'était retrouvée. Lui était plus du genre à s'occuper des vivants que des morts. S'il avait tenu son fils dans ses bras, s'il l'avait vu respirer un peu pour mourir ensuite, nul doute qu'il aurait été anéanti. Mais ça n'était pas arrivé. Astoria s'était juste mise à perdre beaucoup de sang et à pleurer, pPuis plus rien.

Il ne ressentait pas la même douleur que sa mère, il n'avait pas ressenti la même douleur que sa femme pour la seule et unique raison qu'il ne pouvait rien savoir de la douleur de perdre quelque chose… Quelqu'un qui avait grandi en soi. C'était étrange mais il l'avait accepté. Pourtant, il n'avait jamais exprimé cette sensation à haute voix. Ça lui semblait trop horrible, trop triste. Ça lui donnait l'impression d'être insensible. Il ne l'était pas, pourtant. Perdre Astoria avait été une douleur innommable. Même trois ans après, il ne s'en remettait pas vraiment. Il errait comme un fantôme dans son manoir et avait quitté leur lit conjugal pour retourner dans son ancienne chambre. Lui et sa mère n'étaient plus que deux âmes en peine dans un manoir bien trop grand juste pour deux.

- Tu as faim ?

Il se tourna vers sa mère.

- Non, pas vraiment, et toi ?

- Non plus. Je pense que je vais aller me coucher.

- D'accord. Bonne nuit, Mère.

- Bonne nuit, Draco.

Il regarda Narcissa s'éloigner et se mit dans la même position qu'elle : ses yeux fixés sur la baie vitrée. Inconsciemment, ses idées se tournèrent vers Harry Potter. Il avait très envie de savoir… Qui était ce fameux Cupidon.

OoooooooooooOooooooooooO

Lily repoussa la lourde couette qui recouvrait son corps et se tourna en tendant le bras. Quand sa main ne toucha pas ce qu'elle s'attendait à toucher, elle ouvrit les yeux en grand. Elle se redressa dans son lit et se mit debout sur le matelas. Ses cheveux partaient dans tous les sens.

- PAPA ! cria-t-elle.

- En bas, ma puce.

Aussitôt rassurée de la présence de son père, elle descendit précautionneusement du lit et sortit de la chambre. Elle dévala les marches sur les fesses et s'arrêta avant les deux dernières marches. La tête d'Harry Potter apparut en dehors de la cuisine. Il avait les cheveux en bataille et sa barbe semblait reprendre définitivement possession de son visage. Pourtant, il lui offrit un grand sourire et la jeune fille écrasa son visage contre les barres de l'escalier.

- Tu veux bien me porter ?

- J'arrive, mon cœur.

Il sortit complètement et se présenta devant les marches. Il était torse nu et portait un vieux pantalon de pyjama rouge bordeaux. Elle tendit les bras vers lui et il s'empara de son petit corps, la serrant contre lui.

- Tu as bien dormi ?

- Tu n'étais pas là à mon réveil.

- J'ai fait le petit déjeuner.

- C'est des sardines ?

- Non, dit-il en riant. Ce sont des toasts.

Il posa sa fille sur une des chaises de la cuisine et mit sous son nez des œufs, du bacon et des toasts beurrés. Lily s'attaqua au plat avec avidité et Harry la regarda manger en souriant.

- Qu'est ce que tu veux faire aujourd'hui, trésor ?

- Je ne sais pas.

- Est-ce que tu veux aller voir Maman ?

Lily laissa son toast à moitié entamé s'échouer dans son assiette. Elle leva ses grands yeux verts et secoua la tête. Harry baissa les yeux en souriant.

- Tu sais que ça ferait plaisir à ta grand-mère, si on y allait. Peut-être qu'après on pourrait se promener sur le Chemin de Traverse ? Pour voir les nouvelles boutiques ?

Lily fit comme son père et baissa les yeux.

- Je veux bien y aller pour grand-mère.

- Vraiment ?

- Oui, dit-elle d'une petite voix.

- Merci, Lily.

La petite fille releva brusquement sa tête vers son père qui souriait toujours, mais ses yeux à lui étaient légèrement humides. Il se redressa et prit son assiette.

- Je suppose que tu n'as plus faim ?

- Papa ?

Harry lui tournait le dos.

- Oui, trésor ?

- Je t'aime.

Il posa les assiettes dans l'évier et se tourna vers elle pour se mettre à genoux devant sa chaise. Lily s'empressa de se jeter dans ses bras.

- Je veux bien voir Maman. Je suis désolée.

- Ne t'inquiète pas, mon ange. Moi aussi, je t'aime. De tout mon cœur.

Lily frotta son nez contre son cou.

- Je vais prévenir Molly. Peut-être qu'on mangera avec elle ce midi.

- D'accord.

- D'accord, répéta t-il doucement. Monte te laver et te brosser les dents.

Lily s'écarta de son père, embrassa sa joue puis retourna dans sa chambre.

OooooooOooooooO

Quand elle redescendit dans le salon pour enfiler ses chaussures, elle trouva son père déjà prêt. Il portait un pull noir et un pantalon crème. Il s'était rasé et avait réussi à discipliner ses cheveux. Il se tourna vers elle avec un immense sourire.

- On y va, chaton ?

- Oui !

Elle s'assit par terre et mit ses bottes vertes. Elle se releva rapidement et se dirigea vers la cheminée.

- Tu y vas en première et tu fais attention à ne pas trébucher en sortant.

- Je sais.

- Bien sûr que tu sais.

Lily s'empara de la poudre et fit face à son père.

- Le Terrier, dit-elle d'une voix claire.

Quand Harry sortit de la cheminée, il trouva sa fille serrant sa grand-mère contre elle. Molly leva les yeux vers lui et murmura un merci. Le brun lui adressa un doux sourire.

OoooooooooOoooooooooO

Lily observa les murs blancs qui s'étiraient à perte de vue et se fondaient avec le sol et le plafond blanc. Tout était blanc, ici ; c'était une couleur qu'elle supportait de moins en moins. Son manteau aussi était blanc. C'était l'ancien manteau de sa maman et c'était sa grand-mère qui le lui avait donné. Lily aurait largement préféré porter un pull qui gratte, mais ça faisait plaisir à sa grand-mère qu'elle le porte.

Elle releva ses yeux sur son père qui marchait devant elle, pendant qu'elle tenait fermement la main de Molly Weasley. Son papa lui avait offert un autre manteau pour son anniversaire, parce qu'il savait qu'elle n'aimait plus trop celui qu'elle portait. Il était vert velours, comme elle aimait le dire, mais Lily n'avait jamais osé le porter pour sortir. Elle se contentait de le mettre dans sa chambre et de se regarder longuement dedans en se disant qu'il était joli. Elle était triste de ne pas le montrer à son père mais Harry ne se plaignait jamais de la voir mettre le manteau blanc.

Harry s'arrêta soudainement et la légère pression sur sa main que fit sa grand-mère lui indiqua qu'ils étaient arrivés. Lily retint sa respiration et lâcha la main de sa grand-mère. Elle eut alors très envie de faire demi-tour, de demander à son père si elle pouvait attendre dans la salle d'attente. Mais si elle faisait ça, sa grand-mère allait pleurer ou pire, elle allait lui en vouloir.

Lily se colla aux jambes de son père et ce dernier baissa les yeux sur elle.

- On ne reste pas longtemps, chaton, murmura-t-il.

Lily hocha légèrement la tête pour dire qu'elle avait compris. Harry la souleva du sol et s'approcha du lit où dormait sa mère.

Ginny Weasley était plongée dans le coma depuis bientôt trois ans. En fait, ça ferait trois ans le mois prochain. Son état était simple et compliqué à la fois. Compliqué parce qu'il résidait en deux mots : coma végétatif. Ou État végétatif persistant, à son stade. Simple parce qu'il résidait en ces quelques mots : Ginny n'était plus Ginny.

Harry s'assit sur une des chaises qui se tenaient prés du lit et attrapa la main de sa femme.

- Bonjour, ma puce. C'est Harry et Lily, ta maman est là aussi.

- Bonjour, Maman, dit Lily dans un souffle.

- Bonjour, mon cœur,dit Molly en caressant les cheveux de sa fille.

Harry observa Ginny. Ses longs cheveux roux n'avaient plus cet aspect flamboyant qui avait fait chavirer son cœur. Ils étaient secs et ternes. Son visage d'un blanc laiteux était légèrement grisâtre et ses yeux étaient marqués par des cernes. Ginny, la femme forte qu'il avait épousée, qui avait pris des rondeurs agréables en tombant enceinte, n'était plus que pâle maigreur. Mais c'était sa femme. C'était la mère de Lily.

Sa fille s'agita dans ses bras.

- Maman, hier avec Papa, on est allé voir oncle Sirius et j'ai croisé… Cupidon. Enfin, Papa dit que ce n'est pas Cupidon, mais c'était comme il l'avait décrit quand on a lu le livre. Papa pourra te raconter l'histoire. Ça parle d'un garçon qui rend les gens amoureux.

Molly leva les yeux sur sa petite fille qui babillait normalement.

- Qui était ce fameux Cupidon ?

- Je ne crois pas que…, commença Harry.

- Mr. Malfoy.

Molly fronça légèrement les sourcils.

- Malfoy... Draco Malfoy ?

- Oui, répondit Harry.

- Que faisait-il ?

- Je suppose qu'il se rendait sur la tombe de son père.

- Oh… Oui, bien sûr.

Harry la vit arborer un air coupable. Est-ce que cela avait l'air vraiment surréaliste qu'un Malfoy se rende dans un cimetière ? Harry soupira : à une autre époque ça lui aurait certainement fait le même effet qu'à Molly, de savoir qu'il avait croisé Malfoy. Il aurait sûrement été un peu médisant ou totalement impoli. Après tout, Lucius Malfoy n'avait jamais vraiment payé pour ses crimes. Quoique le karma, la providence ou appelez ça comme vous voulez, avait fait le travail à la place du ministère : Lucius Malfoy était mort d'une crise cardiaque un an après la fin de la guerre. Il avait eu droit un article peu élogieux à son propos dans la Gazette et Harry avait trouvé cela franchement hypocrite. Durant longtemps, Lucius avait vu ses louanges être chantées par différents ministres et mort, on le trainait dans la boue. Il avait suivi cette histoire d'un regard peu concerné. Il s'était contenté d'envoyer en secret un mot à Narcissa Malfoy pour lui souhaiter ses sincères condoléance et n'avait jamais reçu de réponse. Harry avait pensé que son intention avait du être très mal prise et n'avaut pas tenté de nouvelle approche. Après tout, le sujet « Malfoy » était de l'histoire ancienne. Mais croiser Malfoy dans le cimetière lui avait renvoyé au visage toutes ces dernières années.

Le blond n'avait pas changé. Harry l'avait toujours trouvé propre sur soi, tiré à quatre épingles. Ses cheveux presque blancs n'étaient plus gominés mais retombaient sur son crâne, disciplinés et raides comme jamais. Il l'avait toisé de son regard anthracite et Harry s'était attendu à une remontrance sur son incapacité à tenir sa gosse mais rien n'était sorti de sa bouche. C'était évident, peut-être que Malfoy avait été plus surpris et moins enclin que lui à prolonger la conversation. Harry devait être dans sa vie le souvenir lointain d'une période peu joyeuse et dans ces cas-là, il n'était jamais bon de rouvrir une plaie. Surtout si elle était presque guérie.

Harry se rendit compte avec une certaine étrangeté qu'il ne savait pas du tout ce qu'était devenu Malfoy. Il s'était gardé d'écouter les racontars de bureau qui disaient de lui qu'il s'était enfermé dans son château et avait finalement abandonné l'idée d'en savoir plus. Comme il le pensait, ce n'était plus son problème. Après tout, la dernière fois qu'ils s'étaient croisés, c'était il y a neuf ans et, même de loin, ils ne s'étaient pas salués.

Le ventre de Lily gargouilla contre sa main et le bruit le fit sortir de ses pensées. Elle se tourna vivement vers lui et Harry esquissa un mince sourire.

- Tu peux attendre dehors si tu veux. Tiens.

Harry sortit un paquet de chocogrenouille et le lui donna. Lily le prit, descendit de ses jambes et observa un peu sa mère qui n'était plus vraiment sa mère. Puis elle sortit de la pièce très lentement.

Harry suivit sa fille des yeux jusqu'à ce qu'elle soit hors de la chambre puis il se pencha vers Ginny.

- Harry…

Le brun leva les yeux sur Molly. Celle-ci avait déjà commencé à pleurer.

- Molly ?

- Merci… Merci d'y croire encore.

- Ne me remerciez pas… Elle est ma femme.

- Oui, dit-elle en souriant.

Que pouvait-il répondre d'autre ? Harry tourna doucement son alliance à son doigt. Il ne pouvait pas ne pas y croire. Parce que s'il arrêtait, alors il devrait faire un choix crucial. Un choix qu'il n'avait plus envie de faire depuis Voldemort. Un choix qui le briserait sûrement, qui l'anéantirait complètement. Et s'il était anéanti, qui veillerait sur Lily ? Lui qui n'avait eu ni mère, ni père ne pouvait se résoudre à retirer ça à sa propre fille.

Mais là était le problème. S'il n'y croyait plus, alors il devrait cesser. Cesser de garder en vie une femme qui ne se réveillerait peut-être jamais. Cesser de garder une femme qui, lorsqu'elle se réveillerait, serait incapable de bouger le moindre muscle si ce n'était celui de ses paupières. Ginny n'était plus Ginny.

Mais Harry continuait d'y croire, parce qu'il fallait une mère pour sa fille et parce qu'il fallait une fille pour une mère.

OooooooooooooOooooooooooO

Harry et Lily avaient le nez collé contre la vitrine du magasin de Quidditch. Tous les deux regardaient avec envie le SylverRaven.

- Papa… Il est magnifique !

Oui, il l'était : avec son manche noir dont la finition se terminait par une pointe en forme de bec et sa paille en argent, ses appuis-pieds du même gris que le métal... Il était sublime.

- Papa, c'est un bon cadeau pour Teddy !

- Ou pour nous !

Lily mit sa main sur sa bouche et se mit à glousser. Harry sourit de toutes ses dents et entra dans la boutique en tenant la main de sa fille.

- Mr. Potter ! Quelle joie de vous voir parmi nous.

Quelques murmures se firent entendre et Harry se félicita d'être venu un jour où l'affluence était moindre.

- Bonjour. J'aimerais acheter le SylverRaven, s'il vous plait.

- Vous… Vraiment ?

Le vendeur le regarda avec des yeux ronds comme des soucoupes. Harry haussa un sourcil. Il n'avait jamais acheté de balai. Il s'était contenté de garder son Eclair de Feu qui faisait très bien l'affaire. Mais à la vitesse à laquelle les nouveaux balais sortaient, le Sylver n'aurait pas de concurrent sérieux avant six ou sept ans, ce qui suffirait à Teddy pour se faire une place dans l'équipe de Quidditch et remporter deux fois la Coupe pour sa maison. Dans tous les cas, il lui fallait un balai avant d'entrer à Poudlard.

- Oui, vraiment. J'aimerais aussi qu'il soit livré à cette adresse, s'il vous plait, à cette date.

Harry sortit un morceau de papier et le donna au vendeur.

- Euh, oui. D'accord. C'est un cadeau ?

- Oui, c'est un cadeau.

- Pour votre femme ? Elle va reprendre son poste ?! Je suivais ses matches, vous savez !

Harry faillit défaillir et la main de Lily serra ses doigts avec force.

- Malheureusement non. Ce cadeau n'est pas pour elle. Combien vous dois-je ?

- Euh... Je ne crois pas que vous puissiez avoir autant sur vous.

- Donc je vous donne le numéro de compte, c'est ça ?

- Oui, c'est exactement ça. Je vous ferai parvenir la facture et l'acte de vente.

- Merci beaucoup. Bonne journée.

- Bonne journée, Mr. Potter.

Harry sortit rapidement et Lily sautilla presque pour le suivre. Une fois dehors, elle regarda son père avec un air inquiet. Harry s'en rendit compte et caressa doucement la tête de sa fille.

- Alors, des bonbons ou une glace ?

- Une glace !

Harry récupéra rapidement de l'entrevue gênante en marchant joyeusement vers le glacier Fortarôme. Quand ils en sortirent, ils tenaient chacun un pot de glace aux trois parfums. Goûts fraises des bois, pluie et melon pour Lily, goûts feu de forêt, tarte à la mélasse et caramel pour Harry. Ils flânèrent un long moment dans la rue, se perdant peu à peu.

- Je ne comprends pas pourquoi les gens sont que dans la Grande Rue.

- Peut-être parce que c'est là que se trouvent tous les magasins ? Nous ne sommes même pas passés voir tes oncles.

- Mais Papa, c'est comme un labyrinthe ! Regarde toutes ces maisons biscornues !

Harry leva les yeux. Sa fille avait raison : ils se trouvaient dans une rue qu'il n'avait jamais vue et les maisons prenaient vraiment des formes bizarres.

- On dirait plein de Terrier ! s'égosilla-t-elle.

Harry essuya de sa serviette la glace qu'elle s'était mise sur le menton.

- Oui, on se croirait surtout dans un roman de Lovecraft, murmura-t-il pour lui-même.

- Oh, Papa, regarde là-bas !

Lily pointait du doigt une enseigne en fer forgé à l'effigie d'un dragon. Harry lut le nom du magasin, si s'en était un.

- Le Magyar Vert.

Lily tira sa main.

- Viens, on va voir ! Viens !

Elle lâcha ses doigts et courut vers la boutique pour coller son visage sur la vitrine. Harry arriva plus lentement et avisa l'écriteau.

Antiquités magiques

Vente et réparation

Ouvert 6j/7 de 9h à 19h et le samedi de 8h à 12h

Harry avisa les quatre assermentations de vente du Ministère. Cela voulait dire que la boutique était ouverte depuis quatre ans. Il voyait Lily trépigner sur place.

- Finis ta glace avant de rentrer.

- Je n'ai plus faim !

Harry soupira. Il prit la glace de Lily de ses mains et la termina, il fallait bien sûr qu'elle ait laissé le goût qu'il détestait le plus : melon. Une fois sa besogne terminée, il fit disparaître le pot et Lily s'empressa de pousser la porte.

Le bruit d'une clochette retentit mais aucun vendeur ne fit son apparition. Alors, comme deux enfants, Harry et Lily parcoururent les différents étalages. Tout était soigneusement rangé. Ce n'était pas en bazar comme les boutiques d'antiquités qu'Harry avait déjà vues. Il y avait un ordre établi. Tout un mur avait des étagères dédiées à des objets de protections, d'alarmes magiques, de porte bonheur. Au milieu de la boutique se tenait un meuble qui formait une sorte de pyramide dont les différents niveaux étaient jonchés d'objets en tout genre : il y avait une statuette à l'effigie d'un dieu égyptien, une sorte de casse tête chinois au prix affolant, une petite boite en verre dans laquelle s'agitaient un criquet de la taille de sa main et qui semblait fait d'une matière proche du goudron. Lily en faisait le tour avec la même crainte et le même éblouissement qu'Harry. Puis tous deux avisèrent l'autre mur au dessus duquel était marqué « créations originales ».

- Papa, regarde ça !

Lily montrait un énorme globe piqué d'une multitude de petits trous et sur lequel semblait se dessiner une carte du monde mais comme en arrière plan d'autre chose.

- Qu'est ce que c'est, Papa ?

- C'est…

Harry étudia l'objet avec attention.

- C'est une mappemonde stellaire.

- Une quoi ?

- C'est comme la terre sauf qu'au lieu de voir uniquement les pays, tu vois les constellations. Je suppose qu'on peut mettre de la lumière à l'intérieur.

- Et tu supposes bien.

Harry se figea en entendant la voix basse et trainante qui venait de parler.

.

.

A suivre...