Note : Voilà, on arrive au bout de ce que j'avais écrit à la fac, quand ce recueil loufoque est né dans mon esprit dérangé, après une overdose de cours d'anatomie. J'écrirai peut-être à nouveau sur nos chers amis gastéropodes, probablement même, mais je ne sais pas quand. Les publications seront épisodiques et très irrégulières, en fonction du temps et de l'inspiration.
Le dernier Pissenlit
Il était énorme.
Seul, au milieu de la lande déserte, il se dressait tel un pilier vers le ciel. Émergeant de la terre sèche et friable dans un tumultueux entrelac de racines brunes, il s'élevait avec majesté, tel un dieu venu des profondeurs. Sa longue tige duveteuse était confortablement nichée dans le creux de deux sublimes feuilles d'un vert doux et tendre, qui appelait aux gourmandises les plus défendues.
Dans une courbe gracieuse, la hampe florale s'achevait sur un capitule altier, duquel s'ouvrait comme dans une cascade les lumineux pétales d'un jaune éclatant, aussi brillant que l'astre solaire lui-même. Les étamines dansaient avec volupté dans la brise du soir, comme une invitation.
Il l'avait repéré le matin même, de loin.
Au moins soixante-dix centimètres.
Et depuis, il avançait, inlassablement. Irréductiblement attiré par cette gâterie inespérée, le jeune escargophone laissait derrière lui une longue traînée de bave collante, peu souciant des mises en gardes maternelles contre les dangers à s'éloigner et à s'isoler du groupe.
Mais à la vue de ce trésor inespéré, de ce saint parmi les saints, le Den-Den Mushi n'avait pu résister et s'était lancé à l'assaut de cette salivante friandise.
Il y était presque !
À peine trois centimètres le séparaient encore des feuilles oblongues, d'ici quelques instants, il pourrait enfin goûter à cette merveille qu'il avait gardé en ligne de mire pendant toute la journée. Toute son attente, tous ses efforts seraient enfin récompensés et il pourrait jouir de cette gourmandise tant prisée.
Plus que deux centimètres !
Il y était, enfin … !
« Oh ! Un pissenlit ! C'est sûrement le dernier de la saison ! »
Et alors que de ses antennes tendues il effleurait enfin le Graal, l'objet de ses convoitises fut soudain, et avec une violence déchirante, arraché du sol et emporté dans les airs, laissant le pauvre gastéropode seul et malheureux devant un cratère de terre retourné.
Disparu ! Envolé son dessert tant attendu ! Volatilisé son met favori ! Parti à jamais...
Quel désespoir, après une lutte si acharnée, après cette course haletante, que de voir l'expression de ses désirs s'évaporer, se dissoudre dans le néant, ne laissant derrière lui qu'une vague odeur, savoureuse et cruelle, ultime souvenir d'un festin inaccessible devenu fantasmagorique.
« Oh, regarde ! »
« Qu'est-ce que tu as trouvé, Chopper ? »
« Un escargophone... »
.
« Ça tombe bien, le dernier avait mystérieusement disparu... » dit Robin.

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