Cela fait un certain temps que je ne me suis pas pliée à l'exercice du défi ... J'espère que je ne suis pas trop rouillée. En tout cas, après avoir consacré beaucoup de temps ces temps-ci à mes propres romans, quel confort de pouvoir se replonger dans l'univers bien connu de Tolkien !

Une guérison

On lui amena le Hobbit au milieu de la nuit. Elrond n'eut qu'à entendre leurs appels, qu'à ouvrir les yeux pour être parfaitement éveillé, et en un instant il fut à son chevet. Le semi-Homme semblait ne plus respirer. Il gisait sur une table de pierre, livide, inerte, comme si la mort s'était déjà emparée de lui.

Elrond posa les mains sur son visage, ferma les yeux.

Une étincelle. Si chétive, mais pourtant réelle. La vie soufflait encore.

On lui apporta tout ce qu'il demanda : l'eau tiède, les linges propres, les lames acérées et les pinces les plus fines qui lui serviraient à fouiller la blessure. Elrond se mit au travail. À son doigt, l'anneau de saphir émettait sa chaleur familière, tantôt cri d'alarme, tantôt bienfaisance.

Autour de lui, les autres l'observaient. Epuisés et graves, Glorfindel et Gandalf s'entretenaient à voix basse. L'autre Hobbit, muré dans son inquiétude, semblait se consumer petit à petit.

Plus apaisante était la présence d'Arwen. Sa fille observait paisiblement les lents progrès de son travail, l'aidant parfois à éponger le front du semi-Homme, posant quelques brèves questions. Sa présence, simplement sa présence. Combien de temps serait-elle encore avec lui ? Elrond avait vu arriver le Rôdeur. Il avait entrevu ...

Tant d'avenirs. Tant de choix. Tant de blessures.

Mais pour l'heure, seul le Hobbit comptait. Le Hobbit, l'Anneau, les Cavaliers Noirs, leur Maître. Le temps s'écoulait inexorablement. Une nuit, un jour, une autre nuit, un autre jour. Rien ne changeait. Malgré tous les soins, malgré toutes les peines, le Hobbit ne se remettait pas. Il demeurait insensible, froid, comme une statue de chair. Cependant, il résistait encore. Elrond sentait la petite vie têtue s'accrocher à un fil, repousser le mal qui tentait d'imprégner le cœur. Aucun des adversaires ne faiblissait dans cette lutte.

Une autre nuit. Un autre jour.

Elrond n'était plus tout à fait conscient de ce qui n'était pas sa tâche. Infatigable, il psalmodiait les mots de guérison, encourageant la petite vie de toute la force de Vilya. Quelque chose n'allait pas. Le mal ne reculait pas. Où pouvait-il encore se cacher ?

À l'approche de la quatrième nuit, enfin, Elrond le sentit. Le minuscule morceau de lame, le dernier fragment du poignard de Morgul qui était demeuré dans la blessure. Imperceptiblement, il avait progressé vers le cœur du semi-Homme. La vie menaçait de perdre la bataille. Mais Elrond l'avait trouvé, désormais, et ne le laisserait plus s'échapper. Les instruments les plus fins s'animèrent entre ses doigts tandis qu'Elrond priait toujours, implorant la lumière d'Eärendil de guider son ouvrage. L'autre Hobbit s'était éveillé en sursaut et le contemplait, bouche bée.

Le semi-Homme prit une soudaine inspiration. Le métal tinta contre le métal. La petite pointe noire dépara le plateau d'argent.

─ Fondez-la, ordonna Elrond.

Il se leva enfin. C'était fait. Ils pouvaient dormir, à présent.

S'il y en a que ça intéresse de retrouver des détails sur la scène, je vous renvoie aux pages 296-297 de l'édition Pocket de La Communauté de l'Anneau.