Bêta : Nanola
NDA : Voilà, c'est le dernier chapitre. Je pourrais dire que je suis triste... mais non. En fait, je suis contente que cette histoire s'achève, 45 chapitres c'est long ^^" Merci à vous toutes et tous de m'avoir suivie, encouragée et d'avoir lu cette histoire.
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Chapitre 45
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Epilogue
Les Éléments, la Lumière et les Ténèbres regardèrent le Monde Libre, tel qu'il était désormais. Ils en furent satisfaits, bien que les Ténèbres regrettaient que ses créatures soient les moins nombreuses. Dès lors, ils décidèrent de s'éloigner du monde qu'ils avaient créé, laissant la responsabilité aux races et espèces qui le peuplaient d'en prendre soin et de continuer à les vénérer, tels les Dieux qu'ils étaient.
Livre de Thadd, verset 26
… … …
Quelques jours plus tard,
Les gémissements de l'Oméga emplissaient la chambre. Autour de lui, trois ombres s'affairaient.
« Draco, l'eau, » ordonna Adélaïde.
L'adolescent obéit en lui tendant la petite bassine.
« Prends place avec Ayase, Draco, » lui demanda alors l'autre Monoïque présent, Soranos.
Draco ne le connaissait pas très bien. Il savait juste qu'il était très doué pour les accouchements et qu'il était présent pour toutes celles à risque, comme l'était celle qui se déroulait à l'instant.
Il se glissa sur le lit à côté de l'Oméga brun. Ayase posa aussitôt sa tête humide de transpiration contre la clavicule du garçon.
« C'est bientôt le moment, Ayase, » dit de sa voix calme bien que directive Soranos.
« Courage, Aya', » murmura Draco en soulevant les mèches bouclées.
Soranos jeta un coup d'œil à la femme présente, peu ravi. Il était contre le fait qu'une femme non nourrice puisse voir un Monoïque entièrement nu. Cependant, comme l'avait signalé Charlie, c'était elle qui avait accouché Ayase la première fois. Seule. Ce qui avait d'ailleurs bien failli coûter la vie à son compagnon, avait-il rajouté en montrant les dents.
« Ayase, prends la position et écarte tes jambes. »
L'Oméga se mit alors à genoux, les bras autour du cou de Draco, il écarta ses jambes et planta ses orteils contre le montant du lit afin de se faire un autre appui. Soranos s'accroupit entre les cuisses ouvertes. Il posa une main sur les reins du parturient et s'aida de l'autre pour regarder entre les fesses d'un œil expert.
« Draco, soutiens-le et place tes mains sur son dos et son ventre, utilise le don de notre sang pour le soulager. Ayase, à la prochaine contraction, tu pousses. Allez, mon frère. »
Les gémissements laissèrent la place aux cris.
… … …
Draco entra chez lui, où l'attendait un Harry plus que nerveux.
« Alors ? »
« Tout s'est bien passé, » répondit le garçon avec un sourire fatigué.
Harry le prit contre lui, soulagé.
« Ayase va bien, alors ? »
« Oui, et miracle, Charlie n'a rien cassé, il n'a frappé personne, il est resté sagement au salon avec ses frères et son père. Il fallait bien qu'ils soient tous là, je te le garantie, sinon il allait démonter toute la maison tellement il était angoissé. »
Harry se mit à rire doucement. Il passa les cheveux blonds derrière les oreilles de son amant avec tendresse.
« Et les bébés ? »
Le regard clair brilla de joie.
« Ils sont tellement beaux ! Setona est née en premier, c'est une petite fille. Elle a déjà une sacrée tignasse pour un nouveau-né. Je pense qu'elle aura les cheveux bouclés d'Ayase et leur couleur. Imagasé est top mignon aussi. Il est tout petit mais je peux te dire qu'il a un sacré caractère, il n'a pas cessé de crier. »
« Un garçon, donc ? »
« Oui, » sourit Draco. « Il est brun aussi, mais je pense pas qu'il sera bouclé, lui. Du moins pour le moment, on verra bien par la suite. »
Draco se blottit contre Harry en soupirant.
« Fatigué ? » supposa l'homme.
« Oui, très. Tu me portes au lit ? »
« Avec bonheur. »
Harry souleva le jeune homme, le faisant éclater de rire. Alors qu'il gravissait les escaliers, Harry lui murmura à l'oreille : « Et sinon, ça n'a pas été trop dur pour toi ? »
Draco fit la grimace.
« Soranos est très directif mais il s'y connaît. Par contre, voir Ayase comme ça... Et puis, c'est vraiment pas ragoûtant, il y a plein de sang et... beurk, quoi. »
Harry haussa un sourcil.
« Finalement, je pense que tu avais raison, Harry. On est pas pressé, on va attendre encore un peu avant de mettre en route notre bébé. »
… … …
Six mois plus tard,
Draco courait dans le couloir du Temple. Il fallait qu'il voit Paul, c'était impératif. Jamais ses Maîtres ne lui auraient adressé un hibou pour lui demander de venir immédiatement auprès de lui si ce n'était pas urgent.
Il était déjà revenu au Temple depuis la naissance des jumeaux, Paul avait été heureux de le revoir, même si déçu que le garçon dorme dans le quartier des Maîtres comme à chaque fois depuis son union.
Paul lui avait semblé aller bien à ces occasions. Alors que se passait-il ?
Il frappa à la porte de la chambre de son ami et sans attendre de réponse, il entra.
« Oh, Paul ! » s'écria Draco.
Le Monoïque était allongé sur son lit, en train de verser toutes les larmes de son corps sur son oreiller. Draco se précipita vers lui, s'allongea à ses côtés et le serra contre son cœur.
« Que se passe-t-il ? »
Le Monoïque ne répondit pas de suite, trop occupé à sangloter. Au bout d'un long moment et après plusieurs reniflements, il balbutia.
« C'est fini. »
« Fini ? Qu'est-ce qui est fini ? »
« Entre Soren et moi ! » pleura Paul.
Il fallut quelques micro-secondes à Draco avant de comprendre. Soren, c'était le nom du prétendant attitré de Paul, son premier et préféré.
« Pourquoi ? » demanda-t-il en caressant les cheveux bouclés.
« Il... Il a courtisé Paracelse, ils ont couché ensemble ! »
Paul fut de nouveau en larmes, proche de l'hystérie. Draco le serra plus fort, tout en embrassant son front et ses cheveux. Paul vivait cela comme une double trahison à n'en pas douter.
« C'est vraiment un salaud si tu veux mon avis. Heureusement que tu t'en es rendu compte avant de le choisir comme époux ! »
« Mais je l'aimais, » pleura Paul. « Pourquoi il a fait ça ? Pour se venger parce que j'ai d'autres prétendants ? Mais c'est ce que je dois faire avant de choisir ! Lui aussi il a connu d'autres hommes avant moi, et il savait bien que c'était lui que je voulais ! Et Paracelse, je veux plus jamais le revoir non plus ! Il savait tout, il savait que j'aimais Soren ! Il avait pas le droit de me prendre mon prétendant ! »
Draco soupira. Effectivement, bien qu'aucune règle ou loi n'interdise ce que Paracelse venait de faire, c'était très mal vu. S'il tenait ce connard, il se transformerait volontiers pour pouvoir le réduire en charpie, espèce pacifique ou non !
« Allez, Paul, mon ami, mon frère, ne pleure plus. Tu rencontreras bientôt un autre homme, sérieux, qui t'aimera pour de vrai. »
Devant les larmes qui redoublèrent, Draco jugea plus prudent de se taire. Il resta ainsi, un long moment. Si longtemps que la nuit tomba.
« Tu restes avec moi, Draco ? » bredouilla Paul qui venait enfin de se calmer.
« Oui, bien sûr. »
Le garçon se redressa, ses beaux yeux bleus encore noyés par les larmes.
« Draco... s'il te plaît... » supplia-t-il.
Draco eut un regard désolé.
« Oh, Paul, non, tu peux pas me demander ça. »
« Draco, je t'en prie. Je n'ai plus que toi... s'il te plaît... »
Il s'effondra sur la poitrine de l'Oméga, des sanglots plein la gorge. Draco ferma les yeux, ses mains voyagèrent sur le dos secoué de spasmes. Il prit plusieurs inspirations, histoire de réfléchir et de laisser parler son cœur. Ce dernier laissa bientôt place à l'instinct. Compagnon-Loup redressa la truffe.
L'adolescent prit le visage sur son torse entre ses mains. Il sourit à son ami, essuya ses larmes de son pouce.
« Ne pleure plus. »
Puis il l'embrassa.
… … …
Un an plus tard,
La tablée était joyeuse, comme à chaque fois depuis leurs arrivés à Pomona.
Draco avait été ému, anxieux, son cœur s'était affolé alors qu'ils marchaient en direction de la maison des Bones. Harry n'avait rien dit, il lui tenait simplement la main, sachant que son amant revivait des moments douloureux. C'était là, sur ce chemin de terre battue et de pavés que sa vie tranquille s'était terminée. Là que sa sœur Édith avait trouvé la mort. Son compagnon déglutissait péniblement, retenant ses larmes et son chagrin.
Les maisons s'étaient reconstruites, certaines sur les ruines des anciennes, d'autres étaient entièrement nouvelles. Draco avait appris par son père qu'une trentaine de familles habitait de nouveau Pomona. Tous les rescapés, à part une seule famille, étaient revenus.
Soudain, toutes ses craintes, toute sa peine s'étaient envolées quand il avait vu Laura courir vers lui.
Ils s'étaient embrassés, avaient pleuré dans les bras l'un de l'autre.
« Oh, Draco, comme tu es beau ! Tu es grand aussi, et fort ! » s'était extasiée sa sœur après plusieurs minutes d'embrassade.
C'était vrai. Contre toute attente, Draco avait encore grandi durant l'été. Il était désormais aussi grand que Harry et même s'il était toujours plus fin que lui, il n'avait définitivement plus rien d'un gringalet.
Draco regarda avec émerveillement le bébé de Laura et Steven dans ses bras. Elle était magnifique, mais Draco n'approuvait pas le choix de son prénom. Caroline était avant tout leur mère. C'était leur mère et elle était morte, la petite-fille n'avait pas, selon lui, à supporter le poids du prénom de la défunte sur ses épaules. Il savait néanmoins que c'était une coutume courante dans de nombreuses familles du royaume, bien qu'il se jura de ne jamais faire de même.
« Comment va ta mère ? » demanda soudain Peter.
Un petit silence s'installa. Laura eut une grimace. C'était encore dur pour elle d'admettre que Draco n'était pas son frère de sang, qu'il avait encore sa mère, bien vivante, qu'il voyait à chaque fois qu'il allait au Temple.
« Elle va bien. Elle vous souhaite bien des choses et espère que vous viendrez à Helga durant l'hiver. Elle aimerait beaucoup te connaître, Laura. Elle aimerait connaître ma famille. «
Le jeune homme sourit à sa sœur qui cligna des yeux et le lui rendit tout en lui caressant la joue.
« Merci, Draco. Ce sera avec un grand plaisir. »
Le repas reprit, dans la bonne humeur. Draco reposa sa nièce dans son couffin et profita du fait qu'il était debout pour étudier la table devant lui. Son père, son mari, sa sœur et son beau-frère étaient là. Ainsi qu'Angus et Jane. Son cœur se gonfla dans sa poitrine, devint chaud. C'était si bon d'être de retour à la maison.
On toqua soudain à la porte, les discussions stoppèrent. Son père allait pour se lever quand Draco l'arrêta d'une main. Il alla lui-même ouvrir la porte.
Devant lui se tenait un petit garçon sur-excité.
« Ils sont là ! Elle est revenue, elle est revenue ! »
Le sang de Draco quitta son visage, il devint pâle comme la mort. Harry se précipita vers lui, inquiet.
« De quoi parles-tu, Jonas ? » s'enquit Laura en se levant.
Mais Draco ne l'entendait déjà plus, il était sorti de la maison, s'avançait dans la brume froide et courait en direction de la maison des Jones. Il courait, les larmes dévalaient ses joues glacées. Et puis il la vit, avec sa longue natte brune.
« Megan ! » hurla-t-il.
La femme se retourna. Elle aussi pleurait. Elle cria et se mit à courir en direction du jeune homme. Ils se percutèrent dans la cour des Jones, se serrèrent dans les bras l'un de l'autre, comme perdus.
« Oh par les Dieux, Draco, tu es vivant ! Tu es vraiment vivant ! » sanglotait Megan. « Je te demande pardon, Draco, si tu savais, je m'en suis tellement voulue de t'avoir laissé ! Oh, Draco, tu es vivant, tu es vivant ! »
Draco ne pouvait répondre tant l'émotion le submergeait. Ils avaient cherché le couple, pendant des mois, et finalement ce qu'il espérait était arrivé : Megan avait décidé de revenir à Pomona, de vaincre ses propres démons en revenant dans le village de son enfance.
Ils restèrent ainsi, la foule du village, leurs familles les entourèrent, mais ils s'en moquaient, ne s'en apercevaient même pas. Et puis ils finirent par se détacher du corps de l'autre. Les yeux de Megan étaient toujours aussi vivants, pensa Draco, vifs et intelligents. Elle avait vieilli, cependant, c'était devenue une vrai femme.
« Tu es resplendissante, » murmura Draco.
Le visage de Megan sembla se fissurer, elle hoqueta avant de bredouiller.
« Et toi... tu es un Monoïque, Draco. »
Elle pleura et le reprit contre elle.
« Je suis désolée, j'ignorais ce que tu étais jusqu'à ce que Greyback... Oh, Draco, j'ai été si lâche ! Est-ce que... est-ce que ? »
Draco serra les poings, ses doigts se crispèrent à la robe de son amie.
« J'ai fait une fausse-couche. Et ensuite, toute la meute a été tuée par des Mages, à Pré-au-lard, là où vous aviez été. Vous m'avez sauvé, Megan. » Il reprit son souffle, incertain. « Epsilon a survécu, je l'ai revu, mais il m'a laissé, il vit en nomade avec une femelle. C'est tout ce que je sais. »
Megan continua de pleurer, le nez dans le cou du jeune homme. Il lui caressa les cheveux, laissa sa peine s'enfuir, son âme d'Oméga souhaitant plus que tout consoler la femme dans ses bras. Son aura l'entoura, la calma.
De nouveau ils se séparèrent, ils réalisèrent alors tout le monde qui les regardait, ému. Puis Draco le vit, lui aussi.
« Ralph ! »
L'homme semblait mal à l'aise. Choqué également. Parce qu'il venait d'apprendre la destruction de son ancienne meute ? Peut-être. Pour autant, Draco ne se posa pas plus de questions, il avança vers le dominant, le regarda dans les yeux, puis fondit contre lui.
« Tu m'as manqué, Ralph. Je suis heureux de te savoir vivant. »
… … …
Trois ans plus tard,
« Quand je pense que je suis là, dans ce putain de Royaume, j'en suis malade. »
« Langage, Draco. »
« Pourquoi, mais pourquoi il a choisi, parmi tous ses prétendants, un de ces connards de Serpentard, tu peux me le dire ? »
« Sans doute parce que c'est Zmij qui a su se faire aimer de lui ? Qu'il est lui aussi profondément amoureux de Paul et qu'il lui offre une belle vie, même si c'est dans ce Royaume que tu détestes ? Maintenant, surveille ton langage. »
« À tous les coups je vais croiser mon enfoiré de paternel et ce crétin de Scorpius, c'est obligé.
« Draco, encore un mot de travers et je te fais manger tes tresses ! »
Le regard d'Ayase le fit bougonner alors que Harry se retenait de pouffer. Charlie, lui, avait décliné l'invitation au mariage. Il était bien trop occupé avec la meute et comme leurs trois enfants rendaient littéralement chèvre leurs grands-parents, il avait argué qu'il ne pouvait les leur confier trop longtemps. Draco soupçonnait fort que c'était surtout un prétexte parce qu'il détestait toutes ces cérémonies mondaines qu'il jugeait barbantes à souhait.
Draco soupira lourdement, faisant lever les yeux d'Ayase au ciel et s'étouffer Harry qui s'étranglait d'un rire contenu. Depuis leur arrivé dans le somptueux manoir où devait se dérouler la cérémonie du mariage, Draco n'avait eu de cesse de râler, son langage devenant de plus en plus fleuri au fil du temps.
Là, ils attendaient, raides comme des statues, au pied de l'autel où devait se présenter le couple. La grande salle s'emplissait peu à peu, les nobles familles ayant été invitées au mariage du cousin germain du prince de Serpentard.
« Bordel, je te jure que si ce n'était pas pour Paul, jamais je n'aurais mis un pied dans ce merdier et... »
« La ferme, Draco, la ferme ! » s'écria Ayase, à bout de nerfs, faisant se retourner toutes les têtes dans leur direction.
… … …
Quelques années plus tard,
L'homme blond arriva en douceur dans la pièce décorée. Il ne s'attarda pas, prenant à peine une ou deux respirations prolongées avant de sortir de la salle. Un fois dans le couloir, il vit une femme s'approcher de lui.
« Bonjour, Sirine, » déclara-t-il en s'inclinant devant elle.
La vielle femme le prit dans ses bras.
« Ah, Draco, comme c'est bon de te revoir. Ta mère est à la nursery. On a reçu un nouveau pensionnaire, tu le savais ? »
« Non, je l'ignorais totalement. Je suis venu car j'ai reçu un hibou il y a deux jours. Maître Hylas me réclame aujourd'hui même et jusqu'à demain, mais je ne sais pour quelle raison. »
« Je l'ignore aussi. »
Ils marchèrent côte à côté jusqu'à ce que Draco parvienne à la porte du Conseil. Il frappa, fit un signe de la main à la nourrice accompagné d'un sourire, puis entra quand il en reçut l'autorisation.
« Maître Hylas, Maître Yvan, » salua-t-il.
Les trois hommes discutèrent un instant de banalités, les Maîtres demandèrent aussi des nouvelles d'Ayase et des enfants.
« Draco, si nous t'avons demandé de venir, c'est parce que nous avons un petit souci, » finit par annoncer Hylas. « Il s'agit d'un de nos pensionnaires. »
« Baldr ? »
« Non, ton élève se porte à merveille. Il s'agit du novice Justinien. »
« Ah, » fit Draco sombrement.
Tout le monde connaissait Justinien, indépendamment du fait que de toute façon, tous les Monoïques se connaissaient les uns les autres.
Justinien était un cas à part. C'était un enfant qui non seulement n'avait pas été abandonné mais qui avait passé toute son enfance avec ses parents. Il était celui qui pleurait quand il venait au Temple et souriait pour les vacances. Avec l'adolescence, il avait perdu le droit de retourner chez lui, mais ses parents, eux, n'avaient eu de cesse de venir le voir. Ils avaient même installé leur commerce à Helga pour cela. En soit, cela aurait pu ne pas être un problème, mais c'en était devenu un.
Justinien refusait son statut, c'était ce qu'il disait tout du moins.
Il avait pourtant accepté son tatouage avec une grande joie. Cependant, après une visite de ses parents suite à l'apposition de cette marque, il s'était encore plus éloigné de ses frères, de ses amis, pleurait souvent et refusait de parler à ses Maîtres. Depuis quelques mois Hylas avait fini par interdire toute communication avec sa famille quand il s'était avéré que c'était bien suite à chacune de leur visite que le garçon devenait de plus en plus maussade et renfermé. Depuis, il ne parlait plus du tout et restait enfermé dans sa chambre ou se promenait, le plus souvent seul, dans les jardins.
Il avait plus de seize ans et n'était toujours pas été initié. Draco avait eu vent qu'il avait tellement paniqué, pleuré et supplié quand il avait appris qu'elle était programmée que les Maîtres avaient renoncé. De ce fait, il n'avais jamais été présenté.
« On ne peut attendre davantage, » poursuivit Yvan. « Son initiation aura lieu ce matin-même. »
Draco s'étonna.
« Il le sait ? »
« Nous l'avons conduit dans la chambre tout à l'heure, il l'a appris à ce moment-là. »
« Je vois, » fit Draco. « Je suppose qu'il ne réagit pas bien. »
« Non. Draco, tu sais que son maître a depuis longtemps baissé les bras avec lui. Pourtant ce novice doit être initié et nous devons savoir ce qui empoissonne son cœur. Tu seras celui qui dirigera la cérémonie, Paul t'assistera. »
« Moi ? » s'écria Draco, éberlué. « Maîtres, je n'ai participé qu'à une seule initiation, et sous le contrôle d'Ehsan ! D'ailleurs, sans lui j'aurais été trop brusque avec le novice et il s'agissait de Mardav, qui n'attendait que ça ! »
« Justement, Draco. Toi. Qui mieux que toi peut comprendre cet enfant ? Nous savons que quelque chose le perturbe, qu'il a peur. Tu es celui qui peut l'apaiser, mieux que quiconque. Quant à ton caractère fougueux, la présence de Paul devrait réussir à le canaliser ou, au pire, il prendra la place du novice si cela dérape. »
Draco passe une main nerveuse dans ses cheveux longs.
« Maître, et si je fais plus de mal que de bien ? »
« Draco, nous n'avons pas le choix. Justinien doit être présenté. Plus le temps passe, plus son blocage perdure alors qu'un jour, il devra se marier, porter la vie. Il n'a pas le choix et de ce fait, nous non plus. Draco, nous pensons que tu es le mieux pour lui. Veux-tu essayer ? »
L'Oméga poussa un soupir.
« Bien, Maîtres. »
Paul l'attendait déjà dans l'anti-chambre. Ils se saluèrent avec plaisir, bien qu'ils soient nerveux tous deux.
« Fallait que ça tombe sur nous, hein ? » dit le Monoïque.
Draco sourit en retour.
« Bon, le Conseil nous regardera et ils interviendront si besoin. Je crois que Soranos et Hypolythe sont là aussi. »
Cette fois, Draco hocha la tête. Savoir que tout ce beau monde les regarderait via les miroirs sans tain qui entouraient la chambre aurait dû le rassurer, mais bizarrement, ce n'était pas le cas.
« Il est prêt ? » demanda-t-il simplement.
« Après qu'il ait piqué une crise de nerfs les nourrices ont réussi à lui donner un calmant. Il a pris aussi une potion pour la détente musculaire. Tout le reste est prêt. »
Les deux hommes revêtirent leur tunique d'un rouge sang.
« Bon, c'est parti, » lança Paul.
Ils ouvrirent la porte et pénétrèrent dans la petite pièce. Comme prévu, les miroirs étaient accrochés partout au mur, le sol recouvert de tapis, matelas, cousins et couvertures confortables. Draco vit de suite la petite table qui supportait de nombreuses fioles, dont celle qui contenait l'huile de plaisir. L'homme soupira une nouvelle fois. Le plaisir, ce n'était pas gagné, pensa-t-il en voyant la petite forme roulée en boule qui sanglotait dans un coin.
Il jeta un bref regard à Paul, désemparé, avant de se diriger vers l'adolescent.
« Justinien ? »
« Non, non, je veux pas... » pleura le garçon.
Cette phrase perça le cœur de Draco. Il l'avait dite si souvent, autrefois. Il ferma les yeux et laissa son aura s'évader. Il était Oméga, son rôle était celui de la compassion, du pardon, du réconfort. Le garçon n'était pas un Lycanthrope, Draco le regretta un bref instant, car s'il l'avait été, son aura aurait été bien plus bénéfique. Néanmoins, elle agissait quand même sur le jeune Monoïque, elle l'apaisait. Grâce à elle, Draco se persuada qu'ils pourraient avancer, que Justinien se relaxerait suffisamment pour leur parler et exprimer enfin tout ce qu'il retenait depuis des lunes. Tout en englobant le garçon de son aura, il s'avança encore, jusqu'à le prendre contre lui.
À sa grande joie, le garçon se blottit aussitôt dans ses bras.
« Maître, pitié. »
« Justinien, ce qui doit être fait se fera, tu le sais tout comme nous. Tu es Monoïque. »
Il secoua la tête.
« Non, je veux pas. »
Paul allait ouvrir la bouche quand Draco le devança. Tous, jusqu'à présent, avaient tenté de démontrer au novice que c'était sa voie, qu'il était béni des Dieux. Mais d'un coup, Draco se demanda si, effectivement, le refus du garçon n'était pas dans l'initiation elle-même, qu'elle était sans doute ailleurs.
« Pourquoi ? »
Lui avait-on seulement posé cette simple question ? Le garçon redressa la tête, dévoilant un visage humide dévoré par deux grands yeux sombres.
« Quoi ? »
« Pourquoi ne veux-tu pas être initié ? Pourquoi ne veux-tu pas être un Monoïque ? »
Les sourcils noirs se froncèrent.
« Parce que ce n'est pas bien ! »
« Pas bien ? Pourquoi donc ? »
« Nous... on est des esclaves ! » s'écria Justinien.
Une fois encore, Draco devança Paul qui allait protester.
« Des esclaves ? Pourquoi des esclaves ? Sais-tu ce qu'est un esclave ? »
« Je... Eh bien... On est des esclaves. Si on est donné à un homme, on perd notre liberté. Moi je suis un homme, je dois prendre une femme et vivre avec mes parents dans leur commerce ! »
« Certes, mais tu ne m'as pas dit pourquoi nous sommes, selon toi, des esclaves. »
« Les Monoïques ne sont pas libres, » s'entêta le garçon. « Si tu es un Monoïque, tu ne vaux pas grand chose, tu ne peux pas faire ce que tu veux. »
« Parce que si tu ne l'es pas, tu le peux ? »
« Oui, bien sûr ! »
« Oh, et qui t'as enseigné tout cela ? »
« Mes parents et ma sœur ! »
Enfin, pensa Draco, on avançait. De ce qu'il en savait, c'était bien la première fois que le novice s'épanchait de la sorte. Sans doute le calmant, ses questions, ainsi que son aura d'Oméga, tout cela devait jouer.
« La liberté est une notion bien particulière, Justinien. Contrairement à tes parents et ta sœur, j'estime que j'ai gagné ma liberté le jour où j'ai appris que j'étais un Monoïque. Je suis libre, depuis. »
« Ce n'est pas ce que dis ma sœur. »
« Que dit-elle ? »
Le garçon baissa la tête.
« Elle se moquait toujours de moi. De mes cheveux longs, de mes tresses. Elle disait que j'étais comme une fille. Mais une fille stupide, moche et inutile. Pire qu'une fille, parce qu'une fille c'est joli, avec des vraies formes, comme elle, pas comme moi. Elle dit que je suis... juste un cul. »
« Charmant, » commenta Paul.
Jalousie, pensa pour sa part Draco.
« Justinien, tu as seize ans. Pourquoi ne pas avoir parlé de tout cela bien avant avec tes Maîtres ? »
« Parce que je ne suis pas un Monoïque, » dit le garçon, des larmes de nouveau dans ses yeux.
« Tu es un Monoïque et tu es bien plus libre que la majorité des peuples de ce monde. »
« Je dois me marier. »
« Dans beaucoup de famille les enfants doivent se marier, ils n'ont pas le choix non plus, parfois ils n'ont même pas le choix de leur conjoint. Ta sœur se mariera, elle aussi, et avec un homme. Et les hommes ne choisissent pas non plus toujours leur métier. Toi, au contraire, tu es libre de choisir ton compagnon parmi les hommes les plus respectables. Tu pourras faire ce que tu veux une fois uni, avoir la vie que tu souhaites, pratiquer ce que tu aimes. Peu ont ce choix en vérité dans notre monde. »
Le garçon s'essuya une larme.
Paul s'agenouilla près de lui.
« Tu as l'âge d'être un homme ou presque, mais tu réagis comme un enfant. Finalement, tu n'étais vraiment pas prêt à être initié avant. »
Draco sentait que le corps contre lui se faisait de plus en plus mou, plus détendu. Il accentua la pression de son aura, si apaisante. Elle parvenait à le calmer, à chasser cette peur et aussi... Draco fronça ses sourcils dorés. Justinien avait peur, oui, mais il y avait encore autre chose. La plaie n'était pas encore vidée. Derrière la peur de l'acte, du moins c'était ce que supposait Draco, il y avait une autre peur... quelque chose qui avait le parfum de la trahison.
« Justinien, parle-nous, mon frère. Nous ne te jugerons pas. Pourquoi n'as-tu pas confié tes craintes à ton Maître ? Aux autres novices ? Pourquoi n'as-tu pas parlé de tout ce qu'on te disait chez tes parents ? »
Des yeux sombres emplis de détresse plongèrent dans les siens. Le jeune Monoïque hésitait visiblement, puis il finit pas craquer.
« J'ai voulu un jour parler à mon Maître. Mais il ne m'a pas écouté quand j'ai essayé de lui parler, il m'a dit que j'étais un petit garçon stupide. Comme ma sœur, elle aussi elle disait que j'étais stupide et naïf... Et ensuite... Ensuite, je n'avais plus le droit. »
« Plus le droit ? Pourtant, tout le monde ici ne cesse de te dire de parler, de te confier à un ami ou un Maître ! » s'exclama Paul.
Cependant, le garçon se contenta de secouait la tête. Il se lécha les lèvre et dévisagea Draco un court instant, comme s'il le jaugeait, avant de reprendre à voix basse.
« Depuis que je suis tout petit, ma famille me dit que vous êtes des menteurs et des voleurs d'enfants. Que je ne dois pas vous faire confiance. Que vous allez me vendre. Ils m'ont dit que si je parlais de ça, vous me vendriez plus vite, et que peut-être vous me tueriez ! »
Draco sentit sa bouche s'ouvrir stupidement.
« Mais... comment as-tu pu croire de telles sornettes ? Tu as bien vu que c'était faux ! Tu as bien parlé avec tes frères plus âgés ! Ceux qui étaient mariés et revenaient au Temple. »
Justinien secoua de nouveau sa tête.
« Pas tellement. Ils m'ont dit que vous étiez tous des menteurs. Que vous nous faisiez croire à un mariage, mais que c'était pas ça. Mon père, il me disait qu'autrefois, ils habitaient à côté d'un homme qui avait acheté un Monoïque. Ils l'entendaient toutes les nuits qui hurlait. Il me disait qu'il était battu, qu'il était... » ses yeux noirs se remplirent une nouvelle fois de larmes. « Et que celui qui l'avait acheté le donnait aux autres hommes du village en échange d'argent. Ils m'ont dit que c'était ce qui m'attendait, moi aussi, si je parlais ou si je vous faisiez confiance. Et que ce n'était pas comme ça qu'un homme devait faire l'amour, que l'amour c'était avec une femme, que le corps d'un homme n'était pas fait pour ça, que je souffrirai ! »
Draco et Paul se jetèrent un coup d'œil, totalement dépités par les propos de l'adolescent.
« Comment as-tu pu croire de telles choses ? Cela dépasse l'entendement, » soupira Paul.
« Mes parents m'avaient prévenu qu'un jour, les Maîtres refuseraient que je les vois, parce qu'ils auraient compris qu'ils me disaient la vérité ! Et c'est ce que vous avez fait ! » se défendit le garçon.
« Tes Maîtres ont essayé plusieurs fois de te parler, ils ont vu que le fait de continuer à fréquenter ta famille te rendait triste, que tu étais angoissé. Ils ont voulu t'aider. »
« Mes parents et ma sœur... ils disent... ils disent... »
« Quoi donc ? »
« Que je ne suis pas un véritable Monoïque. Et que le destin des Monoïques, c'est d'être des esclaves sexuels. Que si je vous écoute, ou j'ai de la chance et je serais donné à un homme riche qui ne me battra pas et m'enfermera dans de la soie, ou que si je n'ai pas de chance, je serai vendu à un homme mauvais, comme le voisin de mon père. Que je deviendrai un prostitué, enfermé dans une chambre à attendre que des hommes viennent pour me faire souffrir. Comme Svarog ! Je ne veux pas ! Et ma sœur, elle dit que je suis moche, ridicule, que je ne suis pas comme les autres Monoïques, alors qu'aucun homme bon ne voudra de moi ! Mon père, la dernière fois que je l'ai vu, il m'a prévenu : si quoi que ce soit entre dans mes fesses, ils me renient. Je dois être un homme, un vrai. Ils m'ont déjà trouvé une fiancée. Je suis le seul garçon de la famille, alors je dois me marier avec une femme et travailler avec papa au magasin. C'est ça, ma destiné selon eux, pas de vivre dans le luxe ou une prison sans rien faire d'autre que vendre mes fesses. »
Le garçon se cramponna à Draco et fondit en larmes.
Ce n'était donc pas le garçon qui rejetait son statut de Monoïque, mais bien son entourage. Un entourage qui lui avait menti depuis sa tendre enfance, l'avait manipulé de la pire façon qui soit. L'Oméga ne comprenait pas comment cela avait pu arriver. En tout état de cause, le Maître référent de Justinien avait été négligent. Ceci était inacceptable au vu de la situation actuelle et l'Oméga se promit qu'une fois l'initiation achevée, il irait personnellement s'expliquer avec ce crétin incompétent.
Il referma ses bras plus fort contre le corps tremblant, le berça tendrement.
« Je sais ce qu'est le mensonge, et je sais aussi ce que c'est qu'être enchaîné, » murmura-t-il. « Et ici, au sein du Temple, avec nous, je peux te promettre que tu es libre. Tu ne seras pas un esclave, tu ne souffriras pas de l'acte sexuel. Tu seras aimé et tu es protégé par tes Maîtres. Écoute ton cœur, écoute ce qu'il te dit. Je suis sûr que tu sais qui te ment, au fond de toi. »
Les mains du garçon se crispèrent.
« C'est si dur, Maître. Ils disaient qu'ils m'aimaient, que c'était eux que je devais croire. Et si c'est faux, alors toute ma vie est un mensonge ! Ils m'auront fait souffrir, pour rien, alors qu'ils disaient qu'ils m'aimaient... »
« Justinien, l'amour, le vrai, ne souffre aucun chantage. C'est maintenant que tu es enchaîné. Délivre-toi de ces chaînes qui t'étouffent, mon frère, » dit l'Oméga.
Draco fit un signe de la main à Paul. Ce dernier se leva et revint vers eux avec un bandeau, qu'il passa autour des yeux du novice.
« Calme-toi, » fit aussitôt Draco alors que ce dernier se redressait dans un sursaut. « Calme-toi, laisse-toi aller, nous allons juste discuter pour l'instant. »
Bien que ce ne soit pas faux, Paul profita de la cécité du garçon pour se déshabiller, ne laissant qu'un bout de tissu carmin lâche sur sa tête, qui recouvrait son nez mais laissait ses yeux et le bas de son visage libres. Il prit Justinien dans ses bras et se tint désormais derrière l'adolescent pendant que Draco se déshabillait également.
« Vous êtes nus, » commenta le garçon.
« Oui. Touche-nous, si tu le souhaites. »
Une main tremblante se posa sur le torse de Draco, avant de se retirer.
« Je ne peux pas. »
« Tu le veux pourtant. Je le sens. À quoi rêves-tu, Justinien, dans le secret de ton lit ? Au corps d'une femme ? Je ne pense pas, non... » murmura Draco alors qu'il ouvrait la tunique du garçon. « Non, tu penses à celui d'un homme, peut-être même à celui d'un de tes frères. C'est à cela que tu rêves, seul dans l'obscurité de la nuit. Tu as envie du corps d'un homme, de prendre et d'être pris. »
« C'est mal, » gémit le garçon. « Je ne dois pas le faire... »
« À qui rêves-tu, Justinien ? »
Le garçon se mordit les lèvres, en proie visiblement à un débat intérieur.
« Je rêve... » murmura-t-il dans un souffle, « parfois je rêve à un homme que j'ai vu, lors d'une de nos sorties à Helga. C'était un cracheur de feu. Il était beau, si beau... »
« Que rêves-tu avec cet homme ? »
« Il... il me touche et... il me fait l'amour, » avoua Justinien, le visage crispé. « Parfois je rêve aussi de mon ami, Damian. Et c'est bon... Mais mon père... il va me renier... Mais je ne veux pas me marier avec une femme non plus ! Je sais plus qui croire... J'ai envie de vous croire, Maîtres, j'ai envie de vous faire confiance, même si ça veut dire que ma famille... que ma famille... »
« Laisse-toi aller, détends toi, » dit Draco à son oreille. « Fais-nous confiance, jeune novice. Tu souffres aujourd'hui de la trahison de ceux qui disaient être ta famille, mais cette douleur disparaîtra quand tu auras accepté ta nature et tes envies. »
Paul le plaqua contre lui et de ses mains, écarta ses cuisses. Le plus jeune rougit, essaya brièvement de les refermer avant d'abandonner. Les mains de Draco étaient sur lui, le caressaient.
« Tu aimes cela. Ton corps parle pour toi, mon frère, » chuchota Paul. « Laisse tes frères t'aimer, laisse tes Maîtres te montrer. Nous sommes ta véritable famille. Nous t'aimons, tel que tu es. Ne retiens pas tes envies, tes espérances et tu seras heureux. »
Draco écoutait d'une oreille distraite les paroles de Paul. Compagnon-Loup s'était réveillé, alerte. Il savait parfaitement ce que faisait Petit-Homme en ce lieu. Draco, tout comme Ayase et la plupart des Monoïques mariés, n'avait honoré que des novices qui le lui avaient demandé, pas d'autres Maîtres. L'Oméga l'avait fait afin de contenter les plus jeunes, de les satisfaire, comme tout bon maître se devait de le faire. Étrangement, ce n'était pas pour déplaire à Compagnon-Loup. Si avec ceux de sa race il relevait le postérieur, il devait bien s'avouer que là, avec les humains, pouvoir démontrer sa force, son ascendance, c'était plutôt agréable. Tout comme la pénétration. Il s'agita, voulant profiter du corps offert.
Draco gronda, il fallait qu'il se contienne. Il jeta un rapide coup d'œil à Paul. Les prunelles bleues le calmèrent aussitôt. Paul était bon, Paul avait été son amant humain autrefois, celui qui savait le calmer et mesurer sa fougue animal. L'adolescent devant lui devait apprendre à s'accoupler mais il était aussi fragile, c'était sa première fois, il devait donc être particulièrement doux avec lui.
L'homme blond se pencha, embrassa la peau douce du garçon qui gémit. Sa langue partit à la découverte du corps alangui soutenu par les bras de son ami. Du cou, il descendit lentement jusqu'au désir du garçon, dévoilé et tendu.
« Oh, Maître... » soupira le novice.
« Le veux-tu ? Veux-tu le corps d'un homme à tes côtés ? Veux-tu que nous t'initions à l'amour et au plaisir de la chair ? » demanda une nouvelle fois Paul.
Justinien serra les dents, se mordilla les lèvres. Des larmes se mirent à couler sur ses joues brunes.
« Je... Oui, c'est ce que je veux, Maîtres, ce que je veux au fond de mon cœur. Mais j'ai si peur ! »
« N'aie plus peur, enfant, » gronda Draco en le tirant vers lui, ses doigts recouverts d'huile. « Je vais prendre soin de toi. Jamais tu ne seras un esclave, crois celui qui l'a été plutôt que ceux qui t'ont menti toute ta vie. »
… … …
Draco monta les escaliers, dans le silence de la nuit. Il se dirigea tout d'abord dans la chambre de sa fille, son premier bébé.
L'enfant dormait, le pouce dans sa bouche. Ses longs cheveux blonds s'étalaient en corolle tout autour de sa tête. Draco s'avança, vérifiant comme à chaque fois la respiration de Dyani. Il remonta un peu la couverture, écarta une mèche de cheveux du front pâle puis sortit en refermant la porte.
Contrairement à la louve à qui elle devait son second prénom, Hannah, elle ne serait certainement pas une dominante. Draco ouvrit la porte de son second enfant. Son fils, lui, le serait, il en portait déjà l'odeur.
Son bébé dormait aussi. Et tout comme sa sœur, il suçait son pouce. Harry avait beau lui répéter cent fois qu'à presque trois ans, Charlus n'était plus un bébé, il s'en moquait.
C'était lui qui avait choisi le prénom de leur fille, Harry celui de leur fils. Enfin, qui avait eu le dernier mot. Alors qu'il s'approchait du bébé, ce dernier ouvrit les yeux, révélant deux billes vertes.
« Papou ? » marmonna-t-il.
« Oui, bébé. Fais dodo, mon chéri. »
« Es revenu ? »
« Oui. Dodo, bébé, dodo. »
Il passa sa main dans les cheveux noirs en bataille alors que Charlus baillait à s'en décrocher la mâchoire. L'enfant se tourna dans l'autre sens, reprit son pouce dans sa bouche afin de le téter avec vigueur. Moins de deux minutes plus tard, il dormait à nouveau.
Draco sourit à l'ange endormi. Il se retourna pour tomber nez à nez avec Harry, appuyé contre le chambranle de la porte qui le regardait en souriant.
Il s'avança vers lui, heureux de trouver refuge dans les bras du mâle. Ils sortirent de la pièce pour gagner leur propre chambre. Draco se déshabilla et se glissa dans le lit où il retrouva la chaleur des bras de son époux.
« Alors, qu'est-ce qu'il y avait de si important au Temple ? » demanda Harry d'une voix innocente.
Celle-ci ne dupa pas Draco. Le nez dans ses cheveux était un signe clair que Harry était jaloux, comme à chaque fois qu'il se rendait au Temple et reniflait du parfum à son retour.
« Un novice qui avait des soucis. Il ne voulait pas être présenté. Mais c'est arrangé. »
« Ah. Tu as vu ta mère ? »
« Oui, elle te passe le bonjour. Baldr aussi, il t'embrasse. Il voulait savoir quand nous reviendrons au Temple. Je lui ai dit dans un mois, avant les fêtes du solstice d'hiver. J'ai dû lui re-promettre au moins dix fois qu'on l'emmenait avec nous chez papi Peter. Il a hâte de revoir tous les cousins. »
C'était ainsi que le petit Monoïque nommait les enfants non seulement de Harry et Draco, mais aussi ceux de Laura et Steven et de Megan et Ralph, installés à Pomona. Draco, mais surtout Harry, avait craqué quand l'enfant n'avait que trois ou quatre ans. Il pleurait qu'il voulait venir passer quelque jour de vacances chez son Maître, parce que son meilleur ami, au Temple, allait lui chez ses parents. Harry, qui pourtant était toujours infâme quand ils étaient à Helga, avait pris le petit bonhomme dans ses bras et lui avait dit oui, avec un grand sourire. C'était depuis devenu une habitude, et quand Dyani était née, l'enfant l'avait considérée comme une ''cousine''. Les Maîtres du Conseil avaient accepté, sans grand enthousiasme, ces relations qu'ils estimaient trop privilégiées entre Draco, son époux et son élève.
Les mains de Harry qui parcouraient son corps, de plus en plus intimement, le ramena au présent.
« Je t'ai manqué ? »
« Hum hum. »
Draco sourit. Ça ne changerait sans doute jamais. Il se félicita de s'être lavé au Temple, d'avoir chassé les odeurs trop personnelles sur sa peau et de s'être passé de la crème légèrement parfumée. Harry savait très bien ce que cela signifiait, ils en avaient longuement discuté tous les deux. Draco préférait toujours se parfumer dans ces cas-là. C'était une certaine façon pour lui de respecter Harry, qu'il ne sente pas d'autres odeurs corporelles que la sienne sur son corps.
Harry le plaqua contre le matelas, éloignant une nouvelle fois ses pensées.
« Et moi, je ne t'ai pas manqué ? » dit-il avec une moue sur le visage.
« Oh si, mon amour, » répondit l'Oméga avec sincérité tout en attirant vers lui le visage de son compagnon.
… … …
Les deux loups se faisaient face, leurs babines retroussées, le poil hérissé. Des grondements sourds s'échappaient de leur gueule, faisaient trembler leur poitrail.
Draco gémit, la tête sur ses pattes avant. Pourtant, il savait que Harry ne risquait pas grand chose, c'était plus pour Gideon qu'il devrait avoir peur. Nonobstant, Harry était son compagnon, le père de ses louveteaux, alors il ne voulait pas qu'il soit blessé ou ridiculisé.
Il se reprit. Non c'était lui qui était ridicule pour avoir de telles pensées. Harry était bien trop fort, puissant pour être vaincu.
Cela faisait des années que Gideon voulait que Harry prenne sa place d'Alpha. Le dominant avait refusé, repoussant l'échéance. Draco savait qu'il en était la principale cause.
Après leur union, et surtout la dégradation de leur lien, Harry avait craint de commettre encore la même erreur, de délaisser son compagnon et que ce dernier ne soit plus assez protégé, ou pire, qu'il s'enfuit ou ne soit enlevé.
Il avait fait en sorte que leur lien soit le plus puissant possible, même si cela voulait dire mettre ses responsabilités vis à vis de la meute en retrait. La naissance des enfants avait prolongé ce refus. Harry voulait être présent pour la grossesse de son amant, pour la naissance des bébés et ensuite avec les nouveaux-nés.
Pourtant, Draco n'avait rien vécu de pénible, contrairement à sa toute première grossesse au sein de la meute du Sanguinaire ou à ce qu'avait vécu Ayase. Il était tombé enceint facilement, après moins de deux mois à chaque fois, n'avait jamais éprouvé la moindre nausée. Les naissances, surveillées par Ayase et Adélaïde, avaient été rapides. Pas sans douleur mais Draco avait tout oublié à l'instant même où ses petits avaient été dans ses bras.
Bien que l'expérience de Dyani soit excellente, Harry n'avait rien voulu savoir et avait fait de même, deux ans plus tard, avec Charlus.
Gideon n'avait pas approuvé ce comportement, cependant, Harry n'était pas un Parvis Alpha pour rien. Il lui avait tenu tête. Pendant dix ans.
Mais là, l'ultimatum avait été posé. Gideon ne voulait plus de la responsabilité de la meute. Harry avait trente-cinq ans, il était uni, avait deux petits, son temps était venu.
Les deux mâles se sautèrent dessus, crocs et griffes en avant. Les autres Lycanthropes se mirent à hurler de concert avec eux dans la clairière. Ils n'étaient pas très nombreux, seuls les membres du Conseil de meute, leur conjoint, la famille proche des combattants – à l'exception des enfants ou des jeunes qui n'étaient pas acceptés - et les anciens avaient le droit d'assister au combat entre Alphas.
Tant mieux, pensa Draco en geignant une nouvelle fois, sa truffe frémissant d'inquiétude. Hors de question qu'Asami, les jumeaux, Dyani et Charlus, assistent à ce spectacle, quand bien même il était en réalité à moitié chiqué.
Les poils volaient, les grognements et cris résonnaient alors que la lutte s'intensifiait. Malgré son rang, Harry devait gagner sa place dans la meute, montrer qu'il en était digne.
Ce qu'il fit en retournant le vieux mâle et en refermant ses crocs autour de son cou.
Gideon s'avoua vaincu, Harry se redressa, s'assit sur son arrière-train et poussa un hurlement lupin de victoire.
Draco ferma les yeux sous sa puissance. L'aura de Harry, déjà impressionnante, sembla exploser, elle recouvrit tout sur son passage, faisant plier les autres Lycanthropes face à elle. Le mâle vainqueur passa ensuite parmi eux, attendant qu'ils dévoilent leur gorge ou ne se couchent sur le dos à son passage.
Sans surprise, il gratifia Charlie d'un coup de langue sur l'oreille, faisant de lui son Bêta. Il fit ensuite de même avec Remus. Francis Dubois fut ignoré. Le mâle avait clairement exprimé sa volonté de se retirer, lui-aussi. Harry respecta donc sa décision. Il ne choisit personne d'autre présent dans la clairière.
Draco savait qu'il allait cependant devoir le faire, une meute de cette importance ne pouvait pas avoir que trois membres à sa tête. Harry hésitait encore entre Lancey, Ron et Heimich. Il attendrait donc l'avis de son Bêta et de son Troisième pour prendre sa décision.
Le loup blanc redressa sa tête, sentant que son compagnon était devant lui. Docilement, il s'allongea sur le dos de tout son long et écarta ses pattes arrières afin que le mâle puisse le renifler autant qu'il le désirait.
Il ne se fit pas attendre. La truffe noire et humide passa sur une oreille, la gorge dévoilée sur laquelle les crocs se refermèrent un instant, puis elle descendit plus bas. Elle s'attarda longuement sur les parties intimes du soumis. Trop longuement. Draco ferma ses yeux d'ambre et de gris. Mais que faisait Harry ? Ce n'était vraiment pas le lieu ni le moment de faire cela ! Une langue râpeuse le parcourut, le faisant frissonner et gémir. La langue continua cependant son ouvrage, jusqu'à ce qu'il soit dur. Oh, par la lune !
Parfois, pendant les nuits de pleine lune, Harry et lui s'amusaient à se procurer du plaisir de cette façon, mais jamais il n'aurait pensé que le désormais Alpha agirait de la sorte cette nuit-là, devant des membres de la meute qui plus est !
Il ne bougea cependant pas, se contentant de geindre doucement. Le dominant cessa soudain ses attentions. Il se redressa et, sans plus attendre, poussa un nouveau hurlement avant de partir, la queue fièrement dressée.
Draco se mit aussitôt sur ses pattes afin de suivre son dominant. Les autres Lycanthropes se transformaient, ils entouraient Gideon, lui aussi redevenu humain.
Le loup blanc ne s'attarda pas là-dessus. Les Lycanthropes allaient prendre soin de leur ancien Alpha, le conduire chez lui, le soigner, le veiller, comme le voulait la tradition pas par réelle nécessité. Demain, le nouveau Conseil de meute se réunirait après que Harry se soit présenté à tout le village comme leur chef. Il allait devoir mordre Charlie et Remus, ainsi que le dernier homme qu'il choisirait pour le seconder.
Draco trottina jusque chez eux. Une fois arrivé, il se transforma et nu, monta dans sa chambre. Harry l'attendait, tout aussi nu que lui, debout près de leur fenêtre.
Il se tourna vers lui. Ses yeux était de l'ambre pure, ses dents des crocs. Draco baissa aussitôt les yeux. Il se dirigea vers le lit, l'aura de l'Alpha, sa puissance, tout autant que ses sens lui dictant sans problème ce qu'il devait faire. Il ne s'allongea pas. Ce n'était pas ainsi que cela devait se faire, lui dicta Compagnon-Loup. À quatre pattes sur le lit, la tête posée sur ses mains, il attendit. Le grognement de Harry l'avertit qu'il était juste derrière lui. L'homme lui écarta durement les fesses, cracha deux fois, joua un instant de ses doigts puis son membre le pénétra. Draco poussa un petit cri sous l'intrusion. Il se mordit les lèvres, heureux que les enfants ne soient pas là mais avec leurs cousins Weasley. Harry s'activait derrière lui, ses mains, ses griffes caressaient son dos alors que son sexe fourrageait son ventre. Draco ne retint pas ses gémissements. C'était chaud, brûlant. De la baise sauvage, de la dominance à l'état brute. Tout n'était que Harry, son Alpha. La main du dominant glissa sur son entre-jambe, se saisit du désir dur et humide du soumis.
Cette fois, Draco poussa de véritables plaintes de plaisir alors que son mâle s'occupait de lui ainsi. L'Alpha était son compagnon, son amant. Il n'y avait aucun doute sur le fait que cet accouplement était une revendication claire de l'Oméga, quand bien même ils étaient déjà unis.
Bien trop vite pour Draco, l'orgasme le terrassa, suivi rapidement par celui de Harry. Ils s'écroulèrent sur le lit, en sueur et la respiration erratique.
Harry vint ensuite contre son soumis qui se retourna, il posa sa tête sur le torse nu et haletant. Draco se mit de suite à caresser la tignasse noire. Harry était bien, détendu. Heureux, il le sentait. L'homme brun soupira et lui embrassa la poitrine, faisant naître un sourire sur le visage de l'homme blond.
« Ça va ? J'ai pas été trop, euh... »
« Tu as été parfait, Alpha. »
« Je, hum, je sais pas trop ce qui m'a pris mais après ce combat, j'ai eu vraiment, comment dire... »
Draco se mit à rire.
« Harry, dé-stress, je te l'ai dit, tu as été parfait. Je le voulais tout autant que toi. »
Il continua de caresser la tignasse ébène, puis incita Harry à se redresser vers lui pour qu'il puisse l'embrasser.
« Je suis très honoré d'être dans ton lit, Alpha, » dit-il doucement une fois que leurs lèvres se quittèrent.
Ce fut Harry qui se mit à rire. Il regarda tendrement son amant, passa ses doigts sur le visage fin.
« Ne m'appelle pas ainsi, Draco. Même en présence de la meute. Je ne le souhaite pas. Je suis ton compagnon. »
Draco sourit, il avança sa tête pour embrasser la bouche entre-ouverte du dominant.
« Merci, Harry. Mais peut-être que je le ferai parfois, car tu es mon Alpha. Cependant, j'apprécie que tu me dises ça. »
Les deux amants reprirent leur baiser, tout en douceur, tendresse et amour.
… … …
Plusieurs autres années plus tard,
Le garçon regardait au loin, le vent soulevait ses mèche brunes et bouclées. Ses yeux d'un vert tendre bordé de brun semblaient comme perdus.
Le paysage ne montrait que plaines, collines et là-bas, au loin, les montagnes. Derrière elles, c'était la guerre, la mort. Où étaient son père, ses frères ? Ici, chez lui, sa mère et ses sœurs se sentaient seules, il le savait. Et il était impuissant pour les aider. Il n'était pas destiné à cela.
Ces mains pâles se posèrent, tout comme son regard, sur son ventre tatoué. Malgré la tempête qu'avait déclenchée l'Elfe Noire, il devait prochainement quitter son village natal afin d'aller définitivement avec ses Maîtres. Ils le protégeraient, autant qu'ils le pourraient. Leur race serait au maximum préservée, au même titre que les princes de chaque espèce.
Mais si la Déesse des Ténèbres gagnait cette guerre, si toutes les créatures maléfiques qu'elle avait libérées ou engendrées dévoraient le monde, qu'adviendrait-il d'eux ? De lui ?
Son propre égoïsme lui fit mal au cœur. Des gens mourraient à l'instant-même, des combattants. Il n'avait pas le droit de penser à sa seule petite personne alors que des hommes de bien luttaient pour leur liberté, à tous.
Son regard dévia vers le ciel. Des nuages sombres s'amoncelaient. La tempête viendrait-elle jusqu'ici ?
Les chiens étaient nerveux, les animaux en général n'avaient eu de cesse de se comporter étrangement aujourd'hui. Lui-même ne se sentait pas à l'aise, comme si un danger les guettait.
Il sursauta alors qu'un bruit de branche brisée se fit entendre derrière lui, à l'orée de la forêt. L'adolescent plissa ses yeux, espérant voir quelque chose. Il ne vit rien, néanmoins un sentiment d'urgence le saisit. Son instinct lui hurlait de partir. Non pas seulement d'ici, mais de son village. Le danger approchait.
Le garçon se mit à courir, le cœur battant. Il entra chez lui et ferma la porte de sa maison, surprenant sa mère et ses sœurs qui s'affairaient à la cuisine. Sans un mot, il gravit les escaliers jusque dans sa chambre.
Là, il s'allongea sur son lit et tenta de se calmer, les yeux clos.
Le danger était partout. Tout son être lui dictait de partir, il devait partir, avant de se faire prendre. Il avait une mission. La Voix le lui avait dit, cette nuit, durant son sommeil.
« Les Sept Joyaux doivent être retrouvés. Seule leur union permettra de chasser les Ténèbres, » murmura-t-il.
Il ouvrit ses yeux.
C'était ridicule. On ne s'affolait pas ainsi à cause d'un simple rêve, aussi stupide qui plus est. Il se leva, regarda la forêt par sa fenêtre. Un hurlement sinistre s'échappa au lointain dans le bois, lui déclenchant un frisson le long de son échine.
Des loups étaient revenus. Depuis deux jours, on les entendait roder.
Il se mordit les lèvres, son regard fixant un point invisible devant lui.
« J'ai peur, » souffla-t-il.
« Fuis ! » cria Draco en se redressant brusquement sur son lit.
« Bordel, Draco ! Quoi ? » cria à son tour Harry, tout aussi paniqué à côté de son compagnon.
L'Oméga blond avait la respiration hachée, son corps était recouvert de sueur. Il cligna des yeux dans l'obscurité, déglutit avec difficulté.
« Draco ? Draco, ça va ? » demanda l'Alpha.
« Je... » L'homme blond regarda autour de lui, désorienté. « Je crois, oui... »
Il s'effondra sur son matelas, un bras passé sur son visage. Il avala sa salive, toujours à la recherche de son calme.
« Tu trembles ! » s'exclama Harry en le prenant contre lui.
Draco fondit dans l'étreinte, il avait envie de pleurer, sans savoir pourquoi.
« J'ai fait un cauchemar. C'était tellement réel. C'était moi mais dans un autre corps, dans un autre monde. J'étais un Monoïque, enfant. Je crois, je crois que j'avais l'âge, tu sais, quand la meute... Et elle était là, Harry, la meute était là... C'était le jour avant qu'elle n'attaque, je le sais. Tout allait recommencer... »
Sans pouvoir l'empêcher, il se mit à trembler violemment alors qu'il retenait ses larmes.
« Allons, ce n'est qu'un cauchemar, ce n'est pas la réalité. Tu es là, avec moi... Calme-toi, mon amour... »
Draco s'obligea à respirer lentement, profondément. Il se sentait ridicule, mais tout avait semblé si vrai, si réel.
« Est-ce que tu crois qu'un autre monde existe ? » chuchota-t-il au bout d'un instant, les caresses de son époux l'ayant un peu rasséréné. « Un autre monde, parallèle au nôtre, dans un autre univers ? Parce que... parce que c'est comme si j'avais eu une connexion avec un être bien vivant, tu sais. Comme un autre moi, ailleurs... »
Harry réfléchit, sa main toujours dans les mèches blondes.
« Je n'en sais rien, mon amour. Comment savoir ? Mais même si cela existe, je suis persuadé que ça n'a rien à voir avec ce dont tu as rêvé. Tu es juste un peu sous pression en ce moment. C'est l'union de Dyani qui t'inquiète à ce point ? »
« Non, je suis heureux pour elle. Enguerand sera un bon compagnon. »
Le silence s'installa de nouveau.
« Draco... est-ce que tu regrettes ? Je veux dire, ta vie ? » demanda Harry.
L'Oméga redressa son visage afin de plonger ses perles grises dans les vertes.
« Comment cela ? »
« Eh bien, tu parles d'un autre monde, d'un autre toi, alors... »
Harry ne finit pas sa phrase, se contentant de hausser les épaules. Mais la petite moue sur son visage parlait pour lui.
Draco sourit, toute trace de son cauchemar ou de sa vision envolée. Il s'avança vers l'homme de sa vie, l'embrassa tendrement.
« Non, je ne regrette rien. Aussi horrible que fut une partie de mon existence, je ne changerai rien si cela devait signifier perdre ce que j'ai aujourd'hui. »
Harry caressa le visage qu'il aimait tant, l'homme qu'il aimait tant.
Ils ne dirent rien d'autre, les mots étant inutiles. Puis leurs lèvres se soudèrent à nouveau.
FIN