Disclaimer :Rien ne m'appartient. Tout l'univers et les personnes appartiennent à JK Rowling.
Chapitre I - Après la bataille
Harry parcourait la Grande Salle d'un regard vide. Les familles s'étaient regroupées, entourant leurs morts et leurs blessés. Les uns pleuraient de chagrin, les autres de soulagement.
Harry, lui, ne pleurait plus. Il lui semblait que son corps ne contenait plus une seule larme à verser.
Pour tout dire, il ne se sentait pas à sa place dans cette salle. Il aurait peut-être dû rejoindre les enfants Weasley qui se tenaient autour du corps de Fred, soutenant leur mère effondrée au pied de leur frère décédé. Il aurait peut-être dû prendre Ginny dans ses bras, comme Hermione le faisait avec Ron … mais il ne pouvait s'y résoudre. Il ne pouvait se soustraire à ce sentiment qu'il était responsable de tous ces morts. S'il avait décidé plus tôt de se rendre à Voldemort, Fred, Remus, Tonks, seraient peut-être encore vie… S'il avait appris correctement l'occlumancie, Sirius serait peut-être encore vie … Si …
Maintenant, plus rien n'avait d'importance. Certes, Voldemort était enfin anéanti, le monde sorcier était enfin délivré du Lord Noir. Mais lui, qui allait le délivrer de ses souffrances, de sa culpabilité, de sa solitude ? Il se sentait si seul. Malgré les regards reconnaissants, les gestes de gratitude de tous les sorciers qu'il avait croisés jusque-là, il se sentait désespérément seul.
Son regard se posa soudain sur trois personnes regroupées dans le coin le plus sombre de la salle. Lucius, Narcissa et Draco Malefoy se tenaient debout, silencieux, fixant le sol comme s'ils espéraient qu'il s'ouvre soudainement et les engloutisse.
Harry contemplait la femme blonde qui lui avait sauvé la vie. Il pensa un instant qu'il lui fallait la remercier. Comme si elle avait lu dans ses pensées, Narcissa releva la tête et fixa Harry de ses yeux gris. Ils ne contenaient nulle animosité, seulement du soulagement. Sa main frôla celle de son fils et Harry comprit que par ce geste, c'était elle qui le remerciait, tout simplement parce que Draco était vivant. Harry hocha la tête en esquissant un sourire. Les yeux gris se détournèrent de lui. S'en était terminé des remerciements.
Lucius Malefoy n'avait rien perçu de cet échange silencieux. Il fixait le sol d'un regard vide et fou à la fois, comme s'il ne réalisait ni où il était ni même qui il était. Harry pensa à ce moment que son esprit avait basculé dans un monde d'où il ne reviendrait sans doute jamais.
Enfin, Harry observa Draco. Il réalisa que jusque-là, il avait délibérément évité de le regarder. Pourquoi craignait-il de détailler son ennemi, sa Némésis ? Pourquoi ne parvenait-il pas à se repaître de sa défaite, de sa déchéance ? Peut-être parce qu'Harry ne trouvait sur le visage de Draco aucune trace de honte, de colère ou de ressentiment. Il se tenait droit, comme à son habitude, ses traits aristocratiques dignes et impassibles, le regard fixe.
Contre toute attente, Harry ne put résister au besoin de lui parler. Il fallait qu'il lui parle, à tout prix. Pour lui dire quoi ? Peu importe. L'abattement qu'il ressentait jusqu'alors s'était mué en une sorte de frénésie qui le poussait à s'approcher du blond. Pour calmer son agitation, il croisa les bras contre lui. A ce geste, il perçut la présence de quelque chose de rigide à l'intérieur de sa veste. Une baguette. A ce moment, il sut.
Prenant une grande inspiration, il se leva, s'approcha de son ennemi et dit d'une voix qu'il espérait être ferme :
- Malefoy, je voudrais de parler.
Il s'attendait à une réplique cinglante de la part du Serpentard mais ce dernier se contenta de hocher la tête et de se diriger hors de la salle. Ils marchèrent en silence quelques dizaines de mètres jusqu'à arriver dans un couloir désert. Malefoy s'arrêta à hauteur d'une fenêtre et s'y accouda. Sans jeter un regard à Harry, il dit :
Je sais ce que tu es venu me dire, Potter. Je sais que ma famille et moi ne sommes plus les bienvenus ici et que tu souhaites nous voir déguerpir. Ne t'inquiètes pas, il n'y en a plus pour longtemps.
Harry resta interdit tant par les paroles du blond que par le ton calme avait lequel il s'était adressé à lui.
- Je .. quoi ? Non, Malefoy, ce n'est pas ce que j'étais venu te dire. Sans attendre de réponse, il poursuivit :
- En fait, je voulais te rendre ceci. Il sortit de la poche intérieure de sa veste la baguette d'aubépine qui appartenait à Malefoy.
A la vue de sa baguette, Malefoy eut un regard empreint de quelque chose qu'Harry n'y avait jamais vu auparavant. De la tendresse ? Pour autant, le Serpentard ne fit aucun geste pour la prendre.
Devant son immobilisme, Harry cru bon d'ajouter :
- Enfin, … je ne sais pas si tu veux la récupérer. Après tout, je te l'ai volée, je m'en suis servi pour … pour tuer … donc, enfin, … je…. je pourrais comprendre que tu n'en veuilles plus, bafouilla Harry.
Malefoy leva alors les yeux vers Harry pour la première fois depuis le début de cet étrange échange. Harry se dit qu'il n'avait jamais vu des yeux pareils. Un mélange de gris intense et de bleu un peu vert qui leur donnaient la couleur de … la Mer du Nord, pensa-t-il avec incongruité.
- Ce n'est pas que je ne veux pas la récupérer, dit finalement Malefoy. Bien au contraire. Mais vois-tu, Potter, d'ici quelques minutes, les Aurors vont débarquer pour m'emmener, ainsi que mon père et ma mère, à Azkaban. Là, je serai délesté de tous mes effets personnels, y compris ma baguette. Dans le meilleur des cas, elle sera confisquée par le Ministère. Dans le pire, elle sera détruite devant moi. Je ne veux pas de ça. Alors, garde-là. Enfin, si tu le souhaites bien sûr … car … car je pourrais comprendre que tu ne veuilles garder aucun souvenir de moi, ajouta-t-il dans un souffle.
Ces derniers mots, Harry n'étaient pas sûr de bien les comprendre. En réalité, il ne voulait pas les comprendre. Raison pour laquelle, il dit
- Malefoy, je garderai ta baguette le temps qu'il faut pour tout ça soit réglé. Ensuite, tu pourras la récupérer quand tu veux !
Le blond eu un sourire triste et Harry pensa que c'était la première fois que son ennemi lui souriait sans sarcasme.
- Potter, je ne crois pas que tu aies pris la mesure de ce qui va se passer prochainement. Mes parents et moi allons être amenés à Azkaban et jugés pour … ça, dit-il en soulevant sa manche pour laisser apparaître la Marque des Ténèbres. J'ai fait entrer des Mangemorts dans l'école, j'ai failli tuer Katie Bell et Weasley. Et j'ai tenté de tuer Dumbledore. Je vais être condamné soit à la prison à perpétuité soit à recevoir le Baiser du détraqueur. Dans un cas comme dans l'autre, je n'aurai plus jamais besoin de ma baguette … Harry tressaillit à ses mots.
« … je n'aurai plus jamais besoin de ma baguette … »" !
« … Je pourrais comprendre que tu ne veuilles garder aucun souvenir de moi… »" !
Aucun souvenir de lui. Il allait mourir. Son ennemi de toujours allait mourir soit en prison, soit sous la bouche d'une créature immonde. Il allait mourir, disparaître de sa vie définitivement. Harry se ressaisit.
- Tu n'as tué personne.
- J'ai tenté de le faire.
- Mais tu ne l'as pas fait ! Je sais que tu ne l'aurais jamais fait …
Malefoy sourit de nouveau tristement.
- Le ministère se moque de ce que j'ai finalement fait ou non. Le Magenmagot ne mettra pas plus de 10 minutes pour débattre de ma culpabilité. C'est fini pour moi, Potter. Dumbledore me l'a dit avant de mourir, j'ai fait les mauvais choix.
Harry ne pouvait gérer ce qu'il venait d'entendre. C'est fini pour moi, Potter … " !
Non, non, non, ça ne pouvait pas être fini. " !
- Pourquoi tu es encore là ? Pourquoi ne t'enfuis-tu pas ? Tu avais le temps de disparaître. Les autres mangemorts ont transplané sitôt la fin de la bataille. Pourquoi es-tu toujours là ? s'énerva Harry.
- Je ne fuirai pas cette fois. J'ai fait les mauvais choix, j'ai choisi les mauvaises personnes, la mauvaise idéologie mais je refuse de continuer dans cette voie. Je ne vivrai pas dans la clandestinité, comme un fugitif tout le reste de ma vie ! Je ne veux pas salir le nom de ma famille plus encore que mon père ne l'a fait en se couchant au pied de ce serpent immonde !
Harry ferma les yeux un instant pour assimiler ce qu'il venait d'entendre. Il était envahi par la colère et le désespoir. Il saisit les bras de Malefoy et planta son regard dans le sien en disant :
- Tu ne vas pas mourir Malefoy. Je ne le permettrai pas ! JE REFUSES QUE TU MEURES, TU ENTENDS ! cria Harry. Je refuse que … tu disparaisses … murmura-t-il.
Les larmes commençaient à lui piquer les yeux mais il se fichait que le blond le voit pleurer. Plus rien n'avait d'importance.
Draco le regarda comme on regarde un enfant qui essaye de vider la mer avec un seau en plastique : avec une douce indulgence et un sourire. Il posa ses mains sur les épaules du Survivant et se pencha à son oreille. Sa voix ne fut qu'un murmure quand il dit :
- Merci Harry. Merci de m'avoir sorti de cet enfer.
Il tourna les talons pour regagner la Grande Salle, laissant un Harry Potter groggy et désemparé, ressassant ses derniers mots. De quel enfer parlait-il ? Au fond de lui, Harry savait qu'il ne parlait pas seulement du Feudeymon de la Salle sur demande …
Harry arriva à la Grande Salle au moment où les Aurors emmenaient les Malefoy sous les regards haineux des familles encore présentes. Personne n'osa cependant prononcer le moindre mot.
Harry constata à ce moment qu'il tenait encore en main la baguette. Sa baguette." !
Il la remit dans la poche intérieure. Pris d'un frisson, il resserra les pans de sa veste contre lui. Curieusement, le contact de la baguette sur son torse lui prodigua une douce chaleur qu'il n'avait plus ressentie depuis longtemps.
Après le départ des Malefoy, Harry s'approcha des Weasley. Il posa doucement ses mains sur les épaules de Ginny qui se retourna pour lui faire face. Elle enroula immédiatement ses bras autours de sa taille et posa la tête contre son épaule. Elle non plus ne semblait plus avoir suffisamment de larmes pour pleurer.
- Je suis tellement désolé Ginny … tout çà, ces blessés, ces morts, … Remus, Tonks, … Fred … tout ça …commença Harry;
- Ne sois pas désolé Harry … Ils voulaient tous se battre, ils savaient … nous savions tous que cette guerre serait sans pitié. Sans toi, Voldemort n'aurait pas pu être vaincu. Le monde sorcier te doit tant, Harry … tu n'es plus seulement le Survivant, tu es le Sauveur, ajouta Ginny avec une ferveur qui fit légèrement frémir Harry.
Sur ses mots, elle fixa Harry d'un regard flamboyant et l'embrassa passionnément. Un peu déstabilisé, Harry ne répondit pas tout de suite à ce baiser ou du moins pas suffisamment vite au goût de Ginny, qui se recula en l'observant avec une moue désapprobatrice.
- Qu'y a-t-il Harry ? demanda-t-elle avec une pointe d'exaspération dans la voix qui énerva prodigieusement le « Sauveur »;
- Ce qu'il y a ? Je ne sais pas trop … une guerre qui se termine dans le sang, des morts, des blessés … Ah oui, et je me suis laissé tuer par un psychopathe à face de serpent parce qu'après tout, c'était mon destin. Comme l'a si bien résumé Rogue, j'ai été élevé comme un porc qu'on amène à l'abattoir … Alors excuse-moi si là tout de suite, je ne suis pas suffisamment empressé à te lécher le fond de la gorge ! explosa Harry.
Le teint de Ginny venait de prendre une vilaine couleur mastic. Sa lèvre inférieure tremblotait légèrement et ses yeux commençaient à se remplir d'eau. Tiens, il lui reste quand même des larmes, se dit Harry. Elle tourna les talons et s'enfuit dans le couloir.
Aussitôt, Ron arriva suivit d'Hermione.
- Harry, que s'est-il passé ? Pourquoi ma sœur s'enfuit-elle comme ça ?
- Je … rien, nous avons eu un petit différend, c'est tout.
- Un petit différend ? Franchement Harry, tu crois que c'est le moment d'avoir un différend avec Ginny ? Bon sang Harry ! Elle vient de perdre un frère, elle se meurt d'amour pour toi depuis des années, elle t'a cru mort et tu n'es pas fichu d'avoir des paroles réconfortantes pour elle ? le sermonna le rouquin.
- Ron … s'il te plaît, tempéra Hermione. On est tous à cran et Harry le premier. On ne peut pas lui en vouloir. Ni à Ginny. Ni à personne en fait. Harry, dit-elle, en se tournant vers l'intéressé, va la voir, elle a besoin de toi plus que de n'importe qui d'autre …
Allons bon, se dit Harry … pourquoi suis-je aussi empoté par moment ? Il me suffisait de la prendre dans mes bras et l'embrasser, de lui tapoter le dos gentiment en lui disant que tout irait bien. Finalement, elle n'en demandait pas plus …
Comme un fait exprès, il trouva Ginny accoudée à la même fenêtre que Malefoy un peu plus tôt. Il revit les yeux gris et le sourire triste de sa Némésis et surtout, il repensa à ses paroles. Imperceptiblement, ses yeux piquèrent à l'évocation de ce souvenir. Il vit alors que Ginny le regardait avec un air plutôt satisfait. Sans doute avait-elle mis ses yeux brillants sur le compte de la culpabilité qu'il devait ressentir à son égard. Harry décida de saisir l'opportunité :
- Je … pardon … Ginny, je suis désolé … je ne voulais pas dire ça… C'est juste que je suis épuisé, je suis à bout … Ne m'en veux pas, s'il te plaît…
En parlant, il s'était approché et l'avait prise dans ses bras. Elle se laissa faire quand il l'embrassa tendrement.
- Je t'aime Harry.
- Je t'aime Ginny, répondit-il machinalement. Tout en la serrant contre lui, il regardait par la fenêtre en se disant que ce paysage était peut-être le dernier que Malefoy avait pu contempler.
Cette pensée le révolta et par réflexe, il resserra son étreinte autour de la rousse. A ce geste, il sentit la baguette d'aubépine logée dans la poche intérieure de sa veste.
A ce moment, Harry prit deux décisions irrévocables. La première : il rendrait sa baguette à Draco, la seconde : Draco ne mourrait pas.